Joseph Conrad (1857-1924) est un écrivain britannique d’origine polonaise, né Teodor Józef Konrad Korzeniowski à Berditchev, en Ukraine. Orphelin à dix ans, il embrasse une carrière de marin à 17 ans, d’abord dans la marine française puis britannique, avant d’obtenir la nationalité anglaise en 1886.
Après avoir quitté la mer en 1894, il se consacre à l’écriture en langue anglaise. Son œuvre, influencée par ses expériences maritimes, comprend des chefs-d’œuvre comme « Le cœur des ténèbres » (1899) et « Lord Jim » (1900).
Marié à Jessie George en 1896, père de deux fils, il meurt d’une crise cardiaque à Bishopsbourne, en Angleterre, laissant derrière lui un patrimoine considérable qui continue d’influencer la culture moderne.
Voici notre sélection de ses meilleurs romans.
1. Le cœur des ténèbres (1899)
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À la fin du XIXe siècle, Charles Marlow, capitaine de la marine marchande britannique, accepte une mission pour le compte d’une compagnie belge : remonter le fleuve Congo afin de retrouver Kurtz, un brillant agent commercial dont on est sans nouvelles. L’homme, réputé pour son intelligence et son efficacité à collecter l’ivoire, aurait sombré dans la démence au cœur de la jungle africaine.
Sur un vieux vapeur rafistolé, Marlow s’enfonce dans un territoire où la nature règne en maître absolu. La végétation luxuriante et menaçante étouffe peu à peu les traces de civilisation. Au fil de sa progression, il découvre l’horreur de la colonisation : l’exploitation brutale des populations locales, la cupidité des administrateurs européens, la violence d’un système qui révèle la part d’ombre de l’homme dit civilisé. Les récits qu’il entend sur Kurtz ne font qu’accroître son obsession pour ce personnage énigmatique.
Ce roman court de Joseph Conrad, publié en 1899, constitue une œuvre majeure de la littérature anglaise. À travers une narration oppressante qui mêle réalisme et atmosphère cauchemardesque, l’auteur livre une réflexion implacable sur la nature humaine et ses ténèbres. Le texte a inspiré de nombreuses adaptations, dont le célèbre film « Apocalypse Now » de Francis Ford Coppola qui transpose l’histoire pendant la guerre du Vietnam.
Aux éditions LE LIVRE DE POCHE ; 216 pages.
2. Lord Jim (1900)
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Dans les dernières années du XIXe siècle, Jim, jeune officier de marine marchande britannique, voit sa carrière et sa vie basculer lors d’une traversée en mer Rouge. Second à bord du Patna qui transporte des centaines de pèlerins musulmans vers La Mecque, il abandonne le navire avec le reste de l’équipage lors d’une avarie, persuadé que celui-ci va sombrer. Le bateau ne coulera finalement pas. Marqué par la honte de cette désertion et déchu de son grade après un procès auquel il a eu le courage de se présenter, Jim erre de port en port en Asie, fuyant son passé et cherchant à se racheter.
C’est à travers le récit de Marlow, capitaine chevronné qui l’a rencontré pendant son procès et s’est pris d’amitié pour lui, que nous découvrons l’histoire de Jim. Le jeune homme trouve finalement refuge dans un village reculé de Malaisie, Patusan, où les habitants le surnomment « Lord Jim » ou « Tuan Jim ». Il y gagne le respect de la population locale en pacifiant les conflits entre différentes factions. Mais son passé va finir par le rattraper.
Chef-d’œuvre de Joseph Conrad publié en 1900, « Lord Jim » interroge les notions d’honneur et de rédemption à travers une narration sophistiquée qui mêle différentes voix et temporalités. L’écriture évocatrice de Conrad donne à ce roman d’aventures maritimes une profondeur psychologique remarquable.
Aux éditions FOLIO ; 507 pages.
3. Typhon (1902)
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Dans la mer de Chine, au début du XXe siècle, le vapeur Nan-Shan fait route vers le port de Fu-Chau. À son bord, deux cents coolies chinois qui rentrent dans leur région après des années de labeur dans les colonies tropicales. Le commandant du navire, le capitaine MacWhirr, est un Irlandais de Belfast au tempérament taciturne. Homme de peu de mots, considéré comme terne par son équipage, il écrit à sa femme des lettres d’une banalité confondante.
Son second, le jeune Jukes, plus vif et plus expressif, ne cache pas son inquiétude quand le baromètre commence à chuter dangereusement. Car un typhon approche, d’une violence rare même pour ces eaux tropicales. MacWhirr, peu enclin aux détours qui feraient perdre du temps et du charbon, décide d’affronter la tempête.
Le navire subit alors l’assaut furieux des vagues et du vent. Dans l’entrepont, la situation se dégrade : les coffres des coolies, remplis de leurs économies en dollars, se fracassent. Une bagarre éclate entre les passagers qui tentent de récupérer leur argent dispersé. Le capitaine et son équipage doivent non seulement lutter contre les éléments déchaînés, mais aussi gérer ce chaos qui menace d’engloutir le navire de l’intérieur.
Joseph Conrad livre ici un récit maritime d’une rare intensité. Sa description du typhon, nourrie par sa longue expérience de marin, frappe par sa puissance évocatrice. Son style sobre et précis donne vie à cette lutte entre l’homme et les éléments.
Aux éditions FOLIO ; 153 pages.
4. Nostromo (1904)
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En 1904, Joseph Conrad publie « Nostromo », un roman qui met en scène le Costaguana, république d’Amérique latine née de son imagination mais fortement inspirée de la Colombie. L’histoire se concentre sur la ville de Sulaco, dont la prospérité repose sur l’exploitation de la mine d’argent de San Tomé par Charles Gould, un Anglais. Le personnage central, Nostromo, est un ancien marin italien reconverti en chef des dockers. Sa loyauté et son courage lui valent l’admiration de tous, particulièrement des puissants qui le surnomment « notre homme ».
Le pays bascule dans le chaos quand le général Montero fomente un coup d’État contre le président Ribiera. Dans l’urgence, Charles Gould charge Nostromo de mettre à l’abri une cargaison d’argent. Accompagné du journaliste Martin Decoud, Nostromo va affronter une terrible nuit sur les flots.
Ce roman puissant dépeint l’emprise destructrice de l’argent sur les hommes, dans un monde où les révolutions masquent à peine les ambitions mercantiles de chacun.
Aux éditions FOLIO ; 553 pages.
5. L’Agent secret (1907)
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À la fin de l’époque victorienne, dans un Londres perpétuellement noyé de brouillard, Adolf Verloc cultive l’art du double jeu. En façade, il dirige avec son épouse Winnie une boutique peu recommandable, refuge d’une famille bancale où vivent aussi sa belle-mère et son beau-frère Stevie, un jeune homme simple d’esprit. Dans l’ombre, il joue les agents secrets pour le compte de la Russie tout en renseignant la police anglaise sur les activités des cercles anarchistes.
Cette existence confortable de petit espion se fissure quand M. Vladimir, nouveau secrétaire d’ambassade, le convoque pour lui donner un ultimatum : organiser un attentat spectaculaire contre l’observatoire de Greenwich. Contraint d’agir, Verloc se tourne vers ses contacts anarchistes, une bande d’idéologues velléitaires dominée par la figure glaçante du Professeur, un inquiétant expert en explosifs qui ne sort jamais sans une bombe sur lui. Cette mission va faire voler en éclats l’édifice de mensonges patiemment construit par Verloc.
Ce roman de Conrad, paru en 1907, frappe par son ton sarcastique et la précision chirurgicale avec laquelle il ausculte la petitesse de ses personnages. L’auteur y décortique les mécanismes du terrorisme politique avec une acuité qui garde toute sa force plus d’un siècle après sa publication.
Aux éditions FOLIO ; 445 pages.
6. La folie Almayer (1895)
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Dans les confins des Indes néerlandaises de la fin du XIXe siècle, « La folie Almayer », premier roman de Joseph Conrad paru en 1895, raconte l’histoire d’un homme qui s’égare. Kaspar Almayer, jeune Hollandais parti chercher fortune à Bornéo, accepte d’épouser la fille adoptive malaise du capitaine Lingard, un négociant prospère qui promet de faire de lui son héritier. De cette union sans amour naît Nina, seule lumière dans l’existence d’Almayer.
Les années passent et les promesses s’effritent. À Sambir, petit hameau sur les rives de la rivière Pantaï, Almayer s’accroche à l’espoir de découvrir un mystérieux trésor évoqué par Lingard avant sa disparition. Pendant qu’il poursuit ce mirage, sa maison somptueuse – baptisée avec ironie « la folie Almayer » par les habitants – se dégrade, symbole de ses ambitions déchues. Sa femme le méprise ouvertement. Quant à Nina, envoyée en pension à Singapour, elle revient transformée, déchirée entre deux mondes qui la rejettent. L’arrivée de Dain Maroola, jeune prince malais dont Nina s’éprend, fait basculer ce fragile équilibre.
Dans cette atmosphère tropicale étouffante, Conrad dépeint l’isolement et la dérive d’un homme ordinaire rattrapé par ses illusions. Le roman pose déjà les thèmes majeurs qui marqueront son œuvre : l’impossible rapprochement entre Orient et Occident, la solitude de l’exilé, le poids du destin.
Aux éditions FOLIO ; 264 pages.
7. Le Nègre du Narcisse (1897)
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En 1897, Joseph Conrad publie « Le Nègre du Narcisse », récit d’une traversée maritime entre Bombay et Londres. L’intrigue se noue autour de James Wait, un marin noir qui monte à bord du grand voilier le Narcisse juste avant le départ. Sa haute silhouette et son attitude distante marquent d’emblée les esprits. Peu après avoir pris la mer, Wait s’effondre, terrassé par une toux persistante. Il affirme être mourant et s’isole dans sa cabine, devenant malgré lui le pivot autour duquel va tourner la vie de l’équipage.
Les dix-sept hommes de bord réagissent différemment face à ce personnage troublant. Le perfide Donkin y voit une occasion de semer la discorde. Le cuisinier Podmore tente de sauver son âme, pendant que le vieux Singleton observe la situation avec un détachement teinté de sagesse. La maladie de Wait, réelle ou feinte, creuse des failles dans la solidarité de l’équipage, jusqu’à ce qu’une tempête dévastatrice ne vienne bouleverser cet équilibre précaire.
Dans ce roman inspiré par son expérience de marin, Conrad dépeint avec force la micro-société d’un navire marchand de la fin du XIXe siècle. Son écriture nerveuse traduit aussi bien la violence des éléments que les tourments intérieurs des hommes.
Aux éditions GALLIMARD ; 168 pages.
8. La Ligne d’ombre (1916)
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À la fin du XIXe siècle, dans le golfe du Siam, un jeune officier de marine britannique s’apprête à quitter son poste pour rentrer en Europe quand le destin en décide autrement. On lui propose soudainement le commandement d’un voilier à Bangkok, en remplacement du précédent capitaine, mort dans des circonstances troubles. Flatté par cette promotion inattendue, il accepte avec enthousiasme, sans se douter des épreuves qui l’attendent.
Dès son arrivée à bord, les difficultés s’accumulent. Son second, M. Burns, obsédé par le souvenir du défunt capitaine, sombre peu à peu dans un délire fiévreux. Une mystérieuse maladie s’abat sur l’équipage. Et comme si cela ne suffisait pas, le navire se retrouve immobilisé en mer par une absence totale de vent. Dans cette atmosphère de plus en plus oppressante, où la superstition se mêle aux hallucinations des malades, le jeune commandant devra puiser au fond de lui-même pour garder son sang-froid et sauver son équipage.
Entre réalisme maritime et touches de surnaturel, Joseph Conrad compose une œuvre où la tension psychologique monte crescendo. Sa prose ciselée capture magistralement l’angoisse grandissante de ce jeune homme confronté à des responsabilités écrasantes, dans un environnement où la folie le dispute à la maladie.
Aux éditions FOLIO ; 256 pages.