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Jean-Paul Kauffmann en 8 livres majeurs – Notre sélection

Jean-Paul Kauffmann en 8 livres – Notre sélection

Jean-Paul Kauffmann naît le 8 août 1944 à Saint-Pierre-la-Cour, en Mayenne. Il passe son enfance en Bretagne, à Corps-Nuds, où ses parents tiennent une boulangerie-pâtisserie. Pendant ses années de pensionnat au collège Notre-Dame d’Orveau, il trouve refuge dans la lecture de Balzac, Stendhal et La Fontaine. Sa passion pour la littérature le conduit à l’École supérieure de journalisme de Lille, dont il sort diplômé en 1966.

Sa carrière débute au Québec, où il effectue son service militaire comme coopérant, avant de travailler dans la presse montréalaise. De retour en France en 1970, il intègre successivement Radio France internationale, l’AFP, puis Le Matin de Paris. En 1985, alors qu’il est grand reporter pour L’Événement du jeudi, il est enlevé à Beyrouth avec Michel Seurat. Sa captivité dure près de trois ans, jusqu’à sa libération le 4 mai 1988.

Après cette épreuve, Kauffmann se consacre à l’écriture. Ses premiers ouvrages, comme « L’arche des Kerguelen » (1993) et « La chambre noire de Longwood » (1997), abordent le thème de l’enfermement sans jamais évoquer directement sa captivité. Ce n’est qu’en 2007, avec « La maison du retour », qu’il aborde son expérience d’otage.

En parallèle, il crée en 1994 la revue L’Amateur de cigare et écrit plusieurs ouvrages sur le vin de Bordeaux. Son œuvre est récompensée par de nombreux prix dont le Grand prix de littérature Paul-Morand de l’Académie française en 2002.

Voici notre sélection de ses livres majeurs.


1. La maison du retour (2007)

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Au début des années 1990, après trois années de captivité au Liban, Jean-Paul Kauffmann cherche un lieu pour se reconstruire. Son choix se porte sur une demeure abandonnée dans la Haute-Lande-Girondine, une région qu’il ne connaît pas mais dont les grands espaces résonnent avec son besoin vital de liberté retrouvée. Cette bâtisse baptisée « Les Tilleuls », située au cœur d’un airial – une clairière gazonnée typiquement landaise – nécessite d’importants travaux de rénovation.

Le narrateur s’installe au premier étage pendant que deux maçons taciturnes, qu’il surnomme Castor et Pollux, restaurent le rez-de-chaussée. Durant cette période transitoire, il redécouvre peu à peu les sensations du monde extérieur : les odeurs des pins, le crissement des aiguilles sous ses pas, la présence rassurante des arbres centenaires. Sa femme et ses enfants le rejoignent les week-ends, mais c’est principalement dans la solitude qu’il entreprend ce lent retour à la vie.

L’originalité de ce récit autobiographique réside dans sa façon d’aborder la renaissance d’un homme à travers la métaphore architecturale. La restauration de la maison devient le symbole tangible de sa propre reconstruction intérieure. Les références à sa détention demeurent discrètes, évoquées par touches subtiles qui accentuent la pudeur du témoignage. Le livre a reçu plusieurs distinctions l’année de sa parution en 2007, dont le prix François-Mauriac de la région Aquitaine et le prix Saint-Simon, saluant la délicatesse avec laquelle l’auteur traite de ce moment charnière de son existence.

Aux éditions FOLIO ; 304 pages.


2. Remonter la Marne (2013)

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À l’automne 2012, Jean-Paul Kauffmann décide d’accomplir un projet singulier : remonter la Marne à pied, de Charenton jusqu’à sa source dans la Haute-Marne. Cette initiative naît d’une double impulsion : ses origines familiales dans l’Est de la France et la découverte fortuite d’un livre de Jules Blain, ancien combattant de la Grande Guerre ayant parcouru ces mêmes rives. Sans itinéraire précis ni contrainte de temps, le journaliste s’engage dans cette traversée avec pour seuls bagages un sac à dos et quelques cigares.

L’itinéraire se déroule sur sept semaines, à raison d’une quinzaine de kilomètres par jour. Des banlieues parisiennes industrielles aux villages champenois, puis jusqu’aux terres plus austères de la Haute-Marne, le marcheur compose avec les méandres du fleuve et les obstacles modernes : zones privatisées, autoroutes, friches industrielles. Ces contraintes l’obligent parfois à s’éloigner des berges, ouvrant la voie à des rencontres inattendues avec les habitants de ces territoires.

L’écriture s’écarte des conventions du récit de marche pour embrasser une dimension plus ample, où l’observation du présent se mêle constamment aux échos du passé. La marche y apparaît comme un acte de résistance tranquille face à l’accélération du monde moderne. La Marne devient le fil conducteur d’une réflexion sur la France contemporaine, incarnée par ces « conjurateurs » que l’auteur rencontre – des individus qui maintiennent vivante leur région malgré le déclin apparent. Les références historiques (des batailles de 1914 à la fuite de Louis XVI) s’intègrent naturellement au récit, tout comme les évocations de Bossuet, La Fontaine ou Breton.

Aux éditions LE LIVRE DE POCHE ; 320 pages.


3. La chambre noire de Longwood (1997)

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En 1993, Jean-Paul Kauffmann se rend sur l’île de Sainte-Hélène, où Napoléon Bonaparte passa les six dernières années de sa vie en exil. Durant neuf jours, l’écrivain arpente ce rocher isolé de l’Atlantique Sud, particulièrement la demeure de Longwood House où l’empereur déchu fut assigné à résidence. Dans cette bâtisse rongée par l’humidité et les termites, Bonaparte dicta ses mémoires à Las Cases avant que celui-ci ne quitte l’île en 1816. S’ensuivirent cinq années de déchéance marquées par l’ennui mortel et les vexations du gouverneur Hudson Lowe, jusqu’à la mort de l’empereur en 1821.

Sur place, Kauffmann rencontre les « gardiens du temple » : Michel Martineau, consul de France, et son père Gilbert, ancien consul, deux personnages hauts en couleurs qui habitent le domaine français de Longwood, racheté aux Anglais en 1858. À travers leurs témoignages et les écrits des compagnons d’exil de Napoléon, l’auteur tente de reconstituer le quotidien de cette période méconnue.

Ce livre valut à son auteur le prix Roger-Nimier, le prix Joseph-Kessel et le grand prix RTL-Lire en 1997. Ancien otage au Liban de 1985 à 1988, Kauffmann porte un regard particulier sur l’enfermement et la solitude de Bonaparte, sans jamais faire référence explicitement à sa propre expérience de la captivité.

L’ouvrage se construit comme une enquête sensitive où chaque détail compte : l’odeur de moisi qui imprègne les murs, la lumière grise qui filtre à travers les fenêtres, le bruit du vent qui s’engouffre dans les couloirs. Cette attention aux sens crée une proximité saisissante avec le quotidien de l’empereur.

Kauffmann nous mène également sur d’autres sites marquants de l’épopée napoléonienne, notamment le champ de bataille d’Eylau. Ces digressions géographiques permettent de mieux saisir la trajectoire d’un homme qui passa du sommet de la gloire à l’isolement le plus total, rongé par la mélancolie jusqu’à son dernier souffle.

Aux éditions FOLIO ; 308 pages.


4. L’arche des Kerguelen (1993)

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En 1992, Jean-Paul Kauffmann réalise enfin un rêve d’enfance : partir pour les îles Kerguelen, archipel français des mers australes surnommé « les îles de la Désolation ». Obsédé depuis sa jeunesse par ce territoire isolé découvert en 1772 par le navigateur breton Yves de Kerguelen, il embarque sur le Marion-Dufresne depuis La Réunion pour une traversée de huit jours. Son objectif est de contempler l’arche naturelle de Port Christmas, une voûte de pierre de 103 mètres qui a marqué l’imaginaire des premiers explorateurs.

Sur place, il partage le quotidien de la petite communauté scientifique et militaire qui occupe la base de Port-aux-Français. Malgré sa détermination, les conditions météorologiques extrêmes et le relief accidenté entravent sa progression vers l’arche mythique. Entre randonnées périlleuses dans un paysage lunaire battu par les vents et conversations avec les résidents temporaires, Kauffmann tente de percer les mystères de cet avant-poste français du bout du monde.

La quête de l’arche se révèle finalement vaine – elle s’est effondrée au début du XXe siècle – mais ce n’est pas l’essentiel. Ce périple aux antipodes survient deux ans après la libération de l’auteur, retenu en otage au Liban pendant trois ans. Sans jamais évoquer directement cette épreuve, le texte laisse transparaître une méditation sur l’isolement volontaire et la solitude choisie, en contrepoint à l’enfermement forcé.

Les Kerguelen deviennent le théâtre d’une réflexion plus vaste sur le rapport au temps et à l’espace. Kauffmann mêle habilement l’histoire tumultueuse de l’archipel – depuis sa découverte jusqu’aux tentatives avortées de colonisation – aux observations du présent. La dimension mystique des lieux imprègne le récit, entre contemplation des éléments déchaînés et évocation des destins brisés qui ont jalonné l’histoire de ce territoire. L’absence d’arbres, le vent omniprésent et les vestiges épars composent un décor propice à l’introspection.

Aux éditions LA TABLE RONDE ; 256 pages.


5. La Lutte avec l’Ange (2001)

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Au début des années 1980, un critique d’art fait découvrir à Jean-Paul Kauffmann « La Lutte avec l’Ange », une fresque réalisée par Eugène Delacroix dans l’église Saint-Sulpice à Paris. Cette première rencontre avec l’œuvre, loin d’être une illumination soudaine, s’apparente davantage à « une impression qui s’infusait doucement ».

Intrigué par le choix de cette scène biblique énigmatique et par la présence inattendue de Delacroix dans ce lieu sacré, le journaliste entreprend une vaste investigation. Sa quête le mène sur tous les sites liés au peintre : son dernier atelier place de Furstemberg, sa maison de Champrosay, jusqu’aux villages les plus reculés où subsistent des traces de son passage.

À mesure que l’enquête progresse, les mystères s’accumulent : pourquoi Delacroix a-t-il choisi précisément cet épisode de la Genèse ? Pourquoi s’est-il épuisé pendant sept années sur ce chantier titanesque, luttant contre l’humidité des murs et les contraintes techniques ?

L’église Saint-Sulpice devient elle-même un personnage à part entière, décrite dans ses moindres recoins et sa vie quotidienne. Les rencontres avec le sacristain, les conférenciers, les artistes habitant les pièces désaffectées composent une mosaïque vivante du Paris contemporain. Ce va-et-vient constant entre le XIXe siècle et notre époque crée une temporalité singulière où le passé et le présent se répondent et s’éclairent mutuellement.

Aux éditions FOLIO ; 336 pages.


6. Courlande (2009)

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Dans les années 1960, Jean-Paul Kauffmann, jeune journaliste français en mission au Canada, rencontre Mara, une libraire d’origine courlandaise qui éveille sa curiosité pour cette région méconnue des pays baltes. Trente ans plus tard, un ami directeur de magazine lui propose de réaliser un reportage sur la Courlande, province occidentale de la Lettonie bordant la mer Baltique.

Accompagné de son épouse Joëlle, l’auteur part sillonner cette terre au passé tumultueux, entre monde slave et germanique. Au volant d’une Skoda rouge, ils visitent les châteaux en ruine des barons baltes, descendants des chevaliers Teutoniques, et croisent la route de personnages singuliers : un professeur allemand érudit, un rocker russophone, un mystérieux « Résurrecteur » qui exhume les corps de soldats disparus pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le livre tire sa force de son caractère hybride, entre documentaire et méditation intime. Ce qui devait être un simple reportage touristique se métamorphose en une réflexion sur la mémoire et l’identité. La Courlande y apparaît comme un concentré d’histoire européenne, carrefour des influences germaniques, slaves et baltes. Les paysages désolés, la lumière terne et les châteaux vidés de leur substance créent une atmosphère singulière qui imprègne le récit. Une correspondance inattendue avec Mara vient clore cette odyssée dans une région qui, selon un personnage rencontré, « a cessé d’être ».

Aux éditions LE LIVRE DE POCHE ; 320 pages.


7. Outre-Terre (2016)

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En 2007, Jean-Paul Kauffmann décide d’emmener sa famille dans l’enclave russe de Kaliningrad, ancien territoire prussien coincé entre la Pologne et la Lituanie, pour assister au bicentenaire de la bataille d’Eylau. Cette confrontation sanglante du 8 février 1807 entre les troupes de Napoléon et l’armée russe s’est soldée par une « victoire » française ambiguë, revendiquée également par les Russes.

Sur place, l’auteur tente de retracer les événements de cette journée meurtrière qui fit près de 25 000 morts. Il cherche notamment à retrouver l’église visible sur le célèbre tableau d’Antoine-Jean Gros, désormais transformée en usine, et qui servit de point d’observation à l’Empereur pendant la bataille.

Au fil de ses pérégrinations hivernales avec femme et enfants dans cette « Outre-terre » aux confins de l’Europe, Kauffmann mêle reconstitution historique méticuleuse et méditation personnelle. La figure du colonel Chabert, personnage de Balzac laissé pour mort à Eylau avant de réapparaître des années plus tard, l’accompagne comme un fantôme familier.

L’ouvrage déploie plusieurs fils narratifs : la reconstitution minutieuse de la bataille à partir des témoignages d’époque, l’analyse du tableau monumental d’Antoine-Jean Gros conservé au Louvre, et les errances de l’auteur dans une région marquée par les bouleversements de l’Histoire. La dimension autobiographique affleure discrètement, Kauffmann s’identifiant au personnage de Chabert après sa propre expérience de trois années de captivité au Liban. Le livre met en lumière ce moment charnière où Napoléon, pour la première fois, entrevoit sa propre finitude. La « victoire » d’Eylau préfigure les désastres à venir et marque le début du déclin de l’Empire.

Aux éditions FOLIO ; 384 pages.


8. Venise à double tour (2019)

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2019. Jean-Paul Kauffmann s’installe plusieurs mois à Venise avec son épouse Joëlle, dans un appartement de la Giudecca. Son projet : pénétrer dans les églises fermées au public, qui constituent un patrimoine considérable mais inaccessible de la cité des Doges. Cette quête singulière trouve son origine dans un souvenir lointain – celui d’une peinture entrevue dans sa jeunesse qui l’a profondément marqué, sans qu’il puisse retrouver dans quelle église elle se trouvait.

Pour mener à bien cette entreprise qui s’annonce complexe, il multiplie les rencontres : Alma, une guide française qui devient sa précieuse alliée ; Claudia, une restauratrice de tableaux ; le mystérieux Grand Vicaire du Patriarcat qui détient les clés de nombreux sanctuaires. Entre bureaucratie vénitienne et portes condamnées, les obstacles s’accumulent. Pourtant, à force de patience et d’obstination, quelques églises lui dévoilent leurs secrets, tantôt splendides, tantôt désolants.

L’originalité de l’ouvrage tient à son angle d’attaque : alors que tout semble avoir été dit sur Venise, Kauffmann choisit d’éclairer la ville par ses zones d’ombre. Un récit qui fait dialoguer intimement mémoire personnelle et histoire collective, où la quête initiale – retrouver une peinture – s’efface progressivement au profit d’une méditation sur le temps qui passe et la beauté qui survit. Les références à Sartre, Lacan ou Hugo Pratt enrichissent le propos sans jamais l’alourdir. La structure même du récit, construite comme une enquête policière, maintient le lecteur en haleine.

Aux éditions FOLIO ; 368 pages.

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