Trouvez facilement votre prochaine lecture
Lewis Carroll en 3 livres – Notre sélection

Lewis Carroll en 3 livres – Notre sélection

Charles Lutwidge Dodgson naît le 27 janvier 1832 dans le Cheshire, en Angleterre. Issu d’une famille anglicane conservatrice, il grandit dans un milieu protégé où il développe très tôt un talent pour l’écriture et les mathématiques. Bégayant et gaucher comme plusieurs de ses frères et sœurs, il trouve refuge dans la création de petites revues familiales.

En 1851, il entre à Christ Church College à Oxford, où il devient plus tard professeur de mathématiques. C’est là qu’il rencontre Alice Liddell, la fille du doyen, qui inspire son œuvre la plus célèbre. Par une journée d’été 1862, lors d’une promenade en barque avec Alice et ses sœurs, il improvise l’histoire qui deviendra « Alice au pays des merveilles », publié en 1865 sous le pseudonyme de Lewis Carroll.

Parallèlement à sa carrière d’écrivain, Dodgson se passionne pour la photographie. Il réalise des milliers de clichés entre 1856 et 1880. Il publie également plusieurs ouvrages de mathématiques sous son véritable nom et invente divers jeux et dispositifs ingénieux.

Bien que le succès d’ « Alice au pays des merveilles » lui apporte richesse et renommée, il continue à mener une vie discrète à Oxford, enseignant jusqu’en 1881. Dans ses dernières années, il publie « Sylvie et Bruno » (1889), qui ne rencontre pas le même succès que ses aventures d’Alice. Souffrant de plus en plus de problèmes de santé, il meurt d’une pneumonie le 14 janvier 1898 à Guildford, laissant derrière lui une œuvre qui continue de fasciner les lecteurs par son mélange de fantaisie et de logique.

Voici notre sélection de ses livres majeurs.


1. Alice au pays des merveilles (Alice #1, roman, 1865)

Disponible sur Amazon Disponible à la Fnac

Résumé

Par un après-midi d’été, Alice s’ennuie aux côtés de sa sœur qui lit un livre dépourvu d’illustrations. Son attention est soudain captée par un Lapin Blanc vêtu d’une redingote, qui consulte sa montre en s’exclamant qu’il est en retard. Intriguée, Alice le poursuit et tombe dans son terrier qui s’avère être un puits sans fond.

À son atterrissage, elle découvre un univers où rien n’obéit aux lois habituelles de la logique. Dans une salle remplie de portes, elle trouve une petite clé et une fiole portant l’étiquette « BOIS-MOI ». En buvant son contenu, Alice rétrécit mais ne peut plus atteindre la clé laissée sur la table. S’ensuit une série de métamorphoses provoquées par différentes substances qui la font successivement grandir et rapetisser.

Elle rencontre ensuite des créatures extraordinaires : une Chenille philosophe fumant le narguilé, un Chat du Cheshire au sourire énigmatique qui apparaît et disparaît à volonté, un Chapelier et un Lièvre de Mars prisonniers d’une éternelle heure du thé. Son périple la conduit jusqu’au château de la terrible Reine de Cœur, dont la réponse à tout est « Qu’on lui coupe la tête ! ».

Alice se retrouve bientôt mêlée à une étrange partie de croquet où les flamants roses servent de maillets et les hérissons de balles, avant d’être appelée comme témoin dans un procès absurde concernant des tartes volées…

Autour du livre

« Alice au pays des merveilles » a vu le jour lors d’une promenade en barque sur la Tamise, le 4 juillet 1862. Ce jour-là, Charles Lutwidge Dodgson (qui prendra le pseudonyme de Lewis Carroll) raconte une histoire improvisée à trois jeunes filles : Lorina, Alice et Edith Liddell, les filles du doyen de Christ Church College à Oxford. Alice, alors âgée de dix ans, est si enchantée par le récit qu’elle supplie Dodgson de le mettre par écrit. Cette requête donnera naissance à un premier manuscrit, « Les Aventures d’Alice sous terre », que l’auteur offrira à la jeune fille en novembre 1864. Encouragé par ses amis et notamment par l’écrivain George MacDonald, Dodgson décide de publier une version enrichie sous le titre « Les Aventures d’Alice au pays des merveilles ».

Le roman est remarquable par son mélange unique de logique et d’absurde, reflet de la double vie de son auteur : professeur de mathématiques le jour, conteur fantasque la nuit. Les jeux de mots, les parodies de poèmes victoriens et les énigmes logiques parsèment le texte, créant plusieurs niveaux de lecture. Le personnage de la Chenille qui fume le narguilé, le champignon aux propriétés magiques et l’atmosphère onirique ont conduit certains à y voir des références aux drogues, une interprétation réfutée par les spécialistes qui soulignent que Carroll n’était pas connu pour en consommer.

La symbolique des personnages s’ancre dans la réalité victorienne : le Chapelier Fou tire son inspiration des chapeliers de l’époque, rendus « fous » par les vapeurs de mercure utilisées dans leur métier. Le Chat du Cheshire fait référence à une expression populaire du comté natal de Carroll. Les illustrations de John Tenniel, qui ont contribué au succès du livre, ne représentent pas la véritable Alice Liddell mais une fillette aux cheveux blonds et au visage rond, devenue l’image canonique du personnage.

Les critiques de l’époque victorienne ont majoritairement salué l’inventivité de l’œuvre. Walter Besant écrivait à la fin du XIXe siècle qu’ « Alice au pays des merveilles » était « un livre d’une extrême rareté qui appartiendrait à toutes les générations à venir jusqu’à ce que la langue devienne obsolète ». Oscar Wilde et la reine Victoria figuraient parmi ses premiers lecteurs enthousiastes.

La postérité du livre se mesure à ses innombrables adaptations. La première, un film muet britannique, date de 1903. La version animée de Disney en 1951 a profondément marqué l’imaginaire collectif. En 2010, Tim Burton propose une relecture plus sombre avec Johnny Depp dans le rôle du Chapelier Fou. Le livre a également inspiré de nombreux artistes, du peintre Salvador Dalí à la créatrice des Moumines Tove Jansson, qui en ont proposé leurs propres illustrations. L’influence d’Alice se retrouve dans la littérature, la musique (comme dans « White Rabbit » de Jefferson Airplane) et même dans des œuvres cinématographiques comme « Matrix », où les références au Lapin Blanc et à la chute dans le terrier sont explicites.

Aux éditions FOLIO ; 384 pages.


2. De l’autre côté du miroir (Alice #2, roman, 1871)

Disponible sur Amazon Disponible à la Fnac

Résumé

Par une froide journée de novembre, Alice, une fillette de sept ans et demi, joue avec ses chatons devant la cheminée de sa maison. Intriguée par le reflet du miroir qui la surplombe, elle s’interroge sur la nature du monde qui pourrait exister de l’autre côté. En grimpant sur le manteau de la cheminée, elle découvre avec émerveillement qu’elle peut traverser la surface réfléchissante.

Dans ce monde inversé où tout obéit à une logique contraire, elle fait la rencontre de pièces d’échecs vivantes et de fleurs douées de parole. La Reine Rouge lui propose alors un défi : si elle parvient à traverser tout l’échiquier géant qui constitue ce pays mystérieux jusqu’à la huitième case, elle pourra devenir reine à son tour. Commence alors un périple parsemé de rencontres extraordinaires…

Autour du livre

Six années séparent la publication de « De l’autre côté du miroir » de celle d’ « Alice au pays des merveilles ». Lewis Carroll, de son vrai nom Charles Lutwidge Dodgson, écrit cette suite en 1871, alors qu’Alice Liddell, la jeune fille qui lui a inspiré le personnage d’Alice, est âgée de quatorze ans. Le succès du premier opus l’incite l’auteur à retrouver son illustrateur John Tenniel, qui accepte cette nouvelle collaboration malgré des réticences initiales liées à un désaccord sur l’impression des illustrations du premier livre. L’ouvrage paraît à la période de Noël avec un premier tirage de 9 000 exemplaires, suivi rapidement d’une réimpression de 6 000 exemplaires supplémentaires. En sept semaines à peine, les 15 000 exemplaires trouvent preneurs.

Si le premier livre s’articulait autour du motif des cartes à jouer, ce nouvel opus se structure autour du jeu d’échecs. Carroll, mathématicien de formation, fournit même en préambule le diagramme d’une partie qui sous-tend l’ensemble du récit. Le monde du miroir obéit à des règles inversées : pour atteindre un endroit, il faut s’en éloigner ; pour rester immobile, il faut courir à toute vitesse. Le temps lui-même subit des distorsions : la Reine Blanche se souvient des événements futurs. Cette inversion systématique ne se limite pas à la trame narrative mais imprègne jusqu’à l’écriture même, comme en témoigne le célèbre poème « Jabberwocky » qui ne peut être lu qu’en le reflétant dans un miroir.

Le livre se distingue de son prédécesseur par une évolution notable du personnage principal. L’Alice de « De l’autre côté du miroir », bien que guère plus âgée que dans le premier tome, manifeste davantage d’assurance et de perspicacité. Cette progression psychologique s’inscrit dans une trame plus construite : de simple pion, elle doit devenir reine, métaphore transparente du passage de l’enfance à l’âge adulte. Ce second opus présente également une tonalité plus mélancolique, reflet possible des tensions qui existaient alors entre Carroll et la famille Liddell.

La traduction de l’ouvrage s’est révélée particulièrement ardue, notamment en raison des nombreux jeux de mots et références culturelles. Les pièges linguistiques s’avèrent plus subtils et complexes que dans le premier tome. Le poème « Jabberwocky », composé presque entièrement de mots inventés, illustre parfaitement cette difficulté. Cette complexité n’a pourtant pas découragé les traducteurs : l’œuvre a été adaptée dans de nombreuses langues, y compris en latin et en espéranto.

« De l’autre côté du miroir » a connu de multiples adaptations à l’écran. Parmi les versions notables figure le film muet de Walter Lang en 1928, le téléfilm de la BBC en 1973 avec Sarah Sutton, et plus récemment l’adaptation cinématographique de James Bobin en 2016 avec Mia Wasikowska. Disney a également incorporé des éléments du livre dans son film d’animation « Alice au pays des merveilles » de 1951, notamment les personnages de Tweedledum et Tweedledee, ainsi que le poème « Le Morse et le Charpentier ». Le monde du théâtre s’en est également emparé avec des adaptations notables comme celle de la Royal Shakespeare Company en 2001.

Aux éditions FOLIO ; 384 pages.


3. La chasse au Snark (poème, 1876)

Disponible sur Amazon Disponible à la Fnac

Résumé

« La chasse au Snark », sous-titré « Une agonie en huit chants », met en scène une expédition maritime singulière. Un équipage hétéroclite de dix membres, mené par un personnage nommé Bellman, part à la recherche d’une créature mythique : le Snark. La quête s’annonce d’emblée absurde, l’équipage naviguant avec une carte entièrement vide.

Parmi les membres de cette étrange expédition figurent un boucher qui ne peut tuer que des castors, un castor qui excelle dans la dentelle, un banquier obsédé par l’argent, et un boulanger qui a oublié son nom et ne sait faire que des gâteaux de mariage.

Le Bellman prévient ses compagnons que certains Snarks sont en réalité des Boojums, créatures particulièrement dangereuses. Quiconque rencontre un Boojum disparaît instantanément. L’équipage poursuit néanmoins sa quête, armé d’objets improbables comme des dés à coudre, des fourchettes et du savon.

Autour du livre

La genèse de ce poème nonsensique remonte à une promenade estivale de Lewis Carroll en juillet 1874 à Guildford, dans le Surrey. Après une nuit presque blanche passée au chevet de son cousin et filleul Charlie Wilcox, atteint de tuberculose, Carroll imagine le dernier vers du poème : « Parce que le Snark était un Boojum, voyez-vous. » Cette phrase énigmatique devient le point de départ d’une œuvre qui sera publiée deux ans plus tard, en 1876, aux éditions Macmillan.

Le poème s’inscrit dans la lignée des œuvres nonsensiques de Carroll, partageant plusieurs éléments avec « Alice au pays des merveilles » et sa suite. On y retrouve notamment huit mots inventés issus du célèbre poème « Jabberwocky ». Carroll choisit Henry Holiday pour illustrer l’ouvrage, une collaboration qui donne naissance à neuf illustrations magistrales. Le refus catégorique de Carroll de laisser représenter le Boojum témoigne du soin minutieux apporté à la construction du mystère.

Les critiques contemporaines de Carroll se sont montrées partagées. Si The Graphic salue une « magnifique pièce de nonsense », Vanity Fair considère l’œuvre comme indigne du nom même de nonsense. The Spectator pressent le potentiel proverbial du vers final, tout en qualifiant le poème d’échec. The Athenaeum le décrit comme « la plus déconcertante des poésies modernes ». La première édition, tirée à 10 000 exemplaires, connaît un succès notable avec deux réimpressions la même année.

L’héritage du poème s’étend bien au-delà de la littérature. Il inspire des adaptations musicales, dont une composition pour trombone d’Arne Nordheim en 1975 et une comédie musicale à succès de Mike Batt. Le poème trouve également des échos dans des domaines scientifiques inattendus : en théorie des graphes, en hydrologie, et même en physique où le terme « boojum » désigne un phénomène de superfluidité. Une île Snark et un rocher Boojum existent dans l’archipel des Andaman et Nicobar, tandis qu’au Mexique, un arbre porte le nom de Boojum. En 2023, Simon Davison signe une adaptation cinématographique de « La chasse au Snark ».

Aux éditions FOLIO ; 144 pages.

error: Contenu protégé