Blaise Cendrars, né Frédéric-Louis Sauser le 1er septembre 1887 à La Chaux-de-Fonds en Suisse, est une figure majeure de la littérature du XXe siècle. Issu d’une famille bourgeoise désunie, il quitte la Suisse à 17 ans pour voyager en Russie, où il découvre sa vocation littéraire.
En 1912, il adopte le pseudonyme de Blaise Cendrars, en référence à la braise et aux cendres du phénix renaissant, et publie son premier poème majeur « Les Pâques à New York ». L’année suivante, il crée « La Prose du Transsibérien », œuvre révolutionnaire mêlant texte et art visuel avec Sonia Delaunay.
Au début de la Première Guerre mondiale, il s’engage dans la Légion étrangère et perd son bras droit en 1915. Cette expérience marquera profondément son œuvre. Naturalisé français en 1916, il se lance dans diverses aventures, notamment le cinéma et le journalisme.
Dans les années 1920, il publie son roman à succès « L’or » (1925) et devient un écrivain reconnu. Grand voyageur, il est particulièrement marqué par ses séjours au Brésil. Dans les années 1940, il écrit une importante tétralogie autobiographique comprenant « L’homme foudroyé » (1945) et « La main coupée » (1946).
Cendrars meurt le 21 janvier 1961 à Paris, laissant une œuvre marquée par le voyage, l’aventure et la modernité. Son écriture, mêlant réel et imaginaire, a profondément influencé la littérature moderne. Il est reconnu comme un des écrivains les plus originaux de son époque, ayant su capturer l’esprit d’un siècle en pleine mutation.
Voici notre sélection de ses livres majeurs.
1. Moravagine (roman, 1926)
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En 1900, Raymond, un jeune psychiatre fraîchement diplômé, prend son premier poste au sanatorium de Waldensee, près de Berne. Il y rencontre un patient du nom de Moravagine, le dernier descendant d’une lignée aristocratique d’Europe de l’Est. Cet homme dangereux, interné pour homicide, exerce sur le médecin une attirance irrésistible.
Raymond décide alors de faire évader Moravagine. Ensemble, ils se lancent dans une odyssée furieuse à travers le monde. De la Russie révolutionnaire aux rives de l’Orénoque, en passant par les États-Unis, les deux hommes vivent des aventures insensées, côtoient des terroristes slaves et des tribus amazoniennes.
Publié en 1926, ce roman de Blaise Cendrars se distingue par son style halluciné et sa construction singulière en 26 chapitres, ordonnés selon l’alphabet. L’auteur met dix ans à l’écrire, hanté par ce personnage de Moravagine qui incarne une part sombre de lui-même. Il y interroge la folie, le mal et la violence qui couvent en ce début de XXe siècle.
Aux éditions GRASSET ; 242 pages.
2. L’or (roman, 1925)
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En 1834, Johann August Suter quitte sa Suisse natale, abandonnant femme et enfants pour tenter sa chance en Amérique. Après quelques années à New York où il enchaîne les petits métiers, il part vers l’Ouest et s’installe en Californie, alors territoire mexicain. Grâce à son sens des affaires et sa ténacité, il bâtit un empire agricole colossal, la « Nouvelle Helvétie », qui s’étend des futures San Francisco à Sacramento.
Mais en janvier 1848, tout bascule : un ouvrier découvre de l’or sur ses terres. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre. Des hordes de chercheurs d’or déferlent sur son domaine, ravagent ses cultures, s’approprient ses terres. En quelques mois, celui qui était sur le point de devenir l’homme le plus riche du monde perd tout.
Avec « L’or », Blaise Cendrars esquisse une parabole sur la folie des hommes et les illusions de la possession. En quelques chapitres secs comme des coups de pioche, il montre comment l’or, promesse de richesse absolue, finit par tout détruire sur son passage.
Le style est à l’image du propos : direct, sans fioritures, presque journalistique. Cette écriture dépouillée souligne la violence du destin qui s’abat sur Suter. Elle fait aussi ressortir l’absurdité tragique de sa situation : être ruiné par ce qui aurait dû le rendre plus riche encore.
Aux éditions FOLIO ; 192 pages.
3. L’homme foudroyé (récit autobiographique, 1945)
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Premier volume d’une tétralogie autobiographique, « L’homme foudroyé » paraît en 1945. Le récit s’ouvre dans les tranchées de la Première Guerre mondiale, où Blaise Cendrars, engagé volontaire dans la Légion étrangère, affronte la peur et la mort. Un obus pulvérise un sergent sous ses yeux – il n’en reste qu’un pantalon ensanglanté.
Blaise Cendrars nous entraîne ensuite à Marseille, dans les années 1920. Il s’installe dans une calanque isolée, La Redonne, où il savoure une existence simple entre parties de pétanque et bouillabaisses avec les pêcheurs du coin.
Le livre culmine avec les « Rhapsodies gitanes », chroniques de la vie dans les terrains vagues de la banlieue parisienne. L’écrivain y brosse le portrait d’une France invisible : celle des roulottes, des baraques en bois et des vendetta. Son style fougueux, sa langue inventive et son art du récit transforment ces fragments de vie en une œuvre puissante qui défie les conventions du genre autobiographique.
Aux éditions FOLIO ; 448 pages.
4. La main coupée (récit autobiographique, 1946)
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En 1914, Blaise Cendrars, alors âgé de 27 ans, s’engage comme volontaire dans la Légion étrangère pour combattre aux côtés de la France. À la tête d’une escouade hétéroclite, ce caporal insoumis harcèle les positions allemandes dans le nord du pays.
Le récit suit le quotidien de ces hommes dans les tranchées de la Somme : la boue, le froid, la vermine, mais aussi les moments de camaraderie. Cendrars brosse le portrait de ses compagnons d’armes – Rossi l’hercule, Garnero le tireur d’élite, Kupka le peintre tchèque – et fustige l’incompétence des officiers supérieurs qui les envoient au combat.
L’histoire s’arrête en septembre 1915, quand un obus lui arrache le bras droit. Écrit trente ans plus tard pendant la Seconde Guerre mondiale, ce témoignage rend hommage à ces légionnaires qui ont donné leur vie pour la France. Sans pathos ni grandiloquence, Cendrars raconte la guerre à hauteur d’homme, entre horreur et absurdité.
Aux éditions FOLIO ; 447 pages.
5. Bourlinguer (récit autobiographique, 1948)
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Publié en 1948, « Bourlinguer » constitue le troisième volet des mémoires de Blaise Cendrars. L’ouvrage se compose de onze récits, chacun portant le nom d’un port : Venise, Naples, Rotterdam, Hambourg… Au fil des escales, l’auteur déroule le fil de sa vie mouvementée, de son enfance à Naples jusqu’à ses années d’errance à travers le monde.
Le chapitre central, « Gênes », occupe près d’un tiers du livre. Cendrars y revient sur un épisode majeur : son retour en Italie à l’âge de vingt ans, épuisé, pourchassé par les autorités après une affaire de contrebande à Téhéran. Dans le clos de Vomero, près du tombeau de Virgile, il s’isole et affronte ses souvenirs d’enfance, ses démons intérieurs.
De ce kaléidoscope d’images et de souvenirs émerge le portrait d’un homme hanté par son passé mais résolument tourné vers l’avant. Le style de Cendrars, fait de phrases sinueuses et de digressions, transcende le simple récit autobiographique. Une œuvre inclassable, entre poésie et reportage.
Aux éditions FOLIO ; 512 pages.