Zadie Smith est une romancière, essayiste et critique littéraire britannique née le 25 octobre 1975 à Londres. Née d’un père anglais et d’une mère jamaïcaine, elle grandit dans le nord-ouest de Londres où elle pratique les claquettes et le théâtre durant son enfance.
Diplômée en littérature anglaise du King’s College de Cambridge en 1997, elle connaît un succès fulgurant dès son premier roman « Sourires de loup » (2001), vendu à plus d’un million d’exemplaires et récompensé par plusieurs prix prestigieux. Elle poursuit sa carrière en publiant plusieurs romans acclamés, dont « De la beauté » (2007) qui remporte l’Orange Prize for Fiction, et « Ceux du Nord-Ouest » (2014) adapté par la BBC.
Parallèlement à son activité de romancière, elle mène une carrière universitaire en enseignant l’écriture créative, notamment à Harvard et à l’Université de New York. Elle est également une essayiste et critique culturelle reconnue, collaborant régulièrement avec des publications comme The New Yorker et The Guardian.
Son roman « L’imposture » (2024), marque son entrée dans le genre historique et figure parmi les dix meilleurs livres de l’année selon le New York Times. Mariée depuis 2004 au poète Nick Laird, avec qui elle a deux enfants, Zadie Smith est considérée comme l’une des voix majeures de la littérature britannique contemporaine.
Voici notre sélection de ses romans majeurs.
1. Sourires de loup (2001)
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La genèse de « Sourires de loup » tient du conte de fées. Étudiante en lettres au King’s College de Cambridge, Zadie Smith n’a que 21 ans quand elle présente 80 pages de son manuscrit à un agent. Ces quelques feuillets suffisent à déclencher une bataille acharnée entre les maisons d’édition qui font monter les enchères. Hamish Hamilton l’emporte et devient son éditeur attitré au Royaume-Uni.
En 2000, le roman fait l’effet d’une bombe. Les honneurs pleuvent : prix Whitbread du premier roman, Guardian First Book Award, prix James Tait Black Memorial. Mais le succès attire aussi les flèches – les éloges cèdent rapidement la place aux critiques acerbes.
Cette saga londonienne suit deux amis que tout sépare : Archie Jones, Anglais jusqu’au bout des ongles, et Samad Iqbal, musulman du Bengale. Leur amitié naît dans les tranchées de la Seconde Guerre mondiale et se poursuit dans le quartier populaire de Willesden. Sur près de cinquante ans, le récit entrecroise leurs destins et ceux de leurs familles, témoins des mutations profondes de la société britannique.
Zadie Smith y manie l’humour corrosif pour disséquer les questions de race et de classe. Sa plume, à la fois légère et incisive, rappelle celle de Dickens. Le roman impose déjà sa signature : une mosaïque de voix et de points de vue, un regard musclé sur le colonialisme, un ancrage dans le Londres populaire, et cette façon unique de saisir les métamorphoses – ou l’immobilisme – des êtres et de leur époque.
Aux éditions FOLIO ; 738 pages.
2. De la beauté (2007)
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Howard Belsey, professeur d’université anglais installé près de Boston, accumule les déboires. Sa carrière de spécialiste de Rembrandt patine, son épouse Kiki ne lui pardonne pas sa récente infidélité. Leurs trois enfants métis s’éloignent : Jerome s’est réfugié dans la religion, Zora se lance corps et âme dans les études, tandis que Levi, le benjamin, renie ses origines bourgeoises pour s’inventer une identité de jeune noir des quartiers.
Le chaos s’installe quand Monty Kipps débarque comme professeur à Wellington. Cet universitaire conservateur d’origine antillaise est l’adversaire intellectuel d’Howard – ils s’opposent sur tout, de l’interprétation de Rembrandt à la discrimination positive. Les relations entre les deux familles se compliquent quand leurs enfants commencent à se fréquenter, tandis qu’une amitié inattendue naît entre les deux épouses.
Les thèmes du métissage culturel et de l’identité s’entremêlent dans cette chronique familiale incisive. L’humour mordant de Zadie Smith fait mouche, qu’elle décrive les petites mesquineries du milieu universitaire ou les questionnements existentiels d’adolescents en quête de repères. Son sens du dialogue et sa capacité à jongler entre les registres de langue donnent vie à des personnages profondément humains.
Aux éditions FOLIO ; 608 pages.
3. Swing Time (2018)
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En 1982, dans un quartier modeste du nord-ouest londonien, deux petites filles métisses se lient d’amitié autour de leur passion pour la danse. Tracey possède un don naturel, tandis que la narratrice, handicapée par ses pieds plats, compense par son intelligence. Entre cours de claquettes et visionnage de comédies musicales avec Fred Astaire, leur complicité grandit malgré des familles aux valeurs opposées.
L’adolescence marque la première rupture. Tandis que Tracey s’inscrit dans une école de danse prestigieuse, la narratrice suit un cursus universitaire qui la mène jusqu’au poste d’assistante d’Aimee, une pop star internationale. Cette nouvelle vie la propulse entre New York et un village d’Afrique où sa patronne finance une école. Pendant ce temps, Tracey enchaîne les échecs professionnels et sombre dans une spirale autodestructrice. Leurs retrouvailles, des années plus tard, marqueront un dernier pas de danse ensemble.
Cette cinquième œuvre de Zadie Smith brode une réflexion sur l’identité, le racisme et les classes sociales à travers le prisme de la danse. Les allers-retours temporels entre l’enfance et l’âge adulte créent une tension narrative qui donne son rythme au récit, à l’image du film « Swing Time » de Fred Astaire qui inspire le titre.
Aux éditions FOLIO ; 576 pages.
4. Ceux du Nord-Ouest (2014)
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À l’approche de la quarantaine, quatre anciens camarades du quartier populaire de Caldwell, au nord-ouest de Londres, suivent des chemins divergents. Leah stagne dans un emploi associatif et ment à son mari sur son désir d’enfant. Keisha a effacé ses origines modestes en devenant Natalie, une brillante avocate qui élève ses enfants loin de la cité de son enfance.
Le quotidien du quartier est rythmé par les apparitions fantomatiques de Nathan, leur ancien camarade devenu toxicomane, et les visites sporadiques de Felix qui tente de reconstruire sa vie après des années d’errance. Un événement tragique va faire voler en éclats leurs certitudes et mettre à nu les tensions qui couvent depuis tant d’années.
Le roman bascule entre différentes formes narratives, comme autant de miroirs tendus aux personnages et à leurs contradictions. Les thèmes du déterminisme social et de l’identité s’incarnent dans une écriture qui refuse la linéarité, préférant les ruptures et les échos. La voix de Zadie Smith pulse au rythme de ce Londres métissé où chacun lutte pour définir sa place.
Aux éditions FOLIO ; 484 pages.
5. L’imposture (2024)
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L’Angleterre des années 1870 s’enflamme pour l’affaire Tichborne : un boucher australien affirme être l’héritier disparu en mer d’une fortune bâtie sur l’esclavage en Jamaïque. Au cœur de ce scandale, Eliza Touchet, veuve intelligente et libre d’esprit, observe les remous qui agitent la société victorienne. Gouvernante chez son cousin William Ainsworth, écrivain ami de Dickens dont la gloire décline, elle corrige ses manuscrits médiocres tout en cachant sa propre acuité intellectuelle dans un monde qui refuse aux femmes le droit de penser.
Le destin la met sur la route d’Andrew Bogle, un ancien esclave jamaïcain devenu témoin clé du procès Tichborne. Ses révélations sur l’enfer des plantations sucrières ébranlent les certitudes d’Eliza sur son pays et sa classe sociale. Tandis que l’opinion publique se déchire autour de cette possible imposture, elle s’interroge sur les mensonges qui fondent la respectabilité victorienne.
Les faux-semblants de l’époque victorienne constituent la matière première de ce roman qui frappe par son audace narrative. À travers une architecture en puzzle faite de courts chapitres, la chronologie se fragmente pour révéler les hypocrisies d’une société. Les scènes de salon où s’affrontent les vanités littéraires contrastent avec la violence de l’exploitation coloniale, tandis que l’imposture judiciaire sert de miroir aux mensonges collectifs. Le regard acéré de Mrs Touchet, femme condamnée au silence mais dotée d’une conscience politique aiguë, traverse ce récit qui questionne sans moralisme les mécanismes de domination sociale.
Aux éditions GALLIMARD ; 546 pages.