Né dans une famille aristocratique russe à Saint-Pétersbourg en 1899, Vladimir Nabokov est contraint à l’exil par la Révolution bolchévique de 1917. Après des études à Cambridge et un séjour prolongé à Berlin, où il commence sa carrière d’écrivain en langue russe, il fuit le nazisme en 1940 pour s’installer aux États-Unis. C’est là qu’il entame une brillante carrière d’écrivain en langue anglaise, couronnée par le succès mondial de « Lolita » (1955).
Naturalisé américain en 1945, il s’installe définitivement en Suisse en 1959, où il poursuit son œuvre jusqu’à sa mort à Lausanne en 1977. Romancier virtuose en deux langues, Nabokov laisse une œuvre majeure du XXe siècle, marquée par l’exil et le mélange des cultures.
Voici notre sélection de ses meilleurs romans.
1. Lolita (1955)
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Publié en 1955, « Lolita » relate la passion dévastatrice d’Humbert Humbert, un professeur de littérature d’une quarantaine d’années, pour Dolorès Haze, une préadolescente de 12 ans qu’il surnomme Lolita. L’action se déroule dans l’Amérique des années 1950. Humbert, obsédé par les « nymphettes », ces filles entre l’enfance et la puberté, emménage comme locataire chez Charlotte Haze, la mère de Lolita, qu’il épouse afin de rester près de l’objet de son désir.
Quand Charlotte décède accidentellement, Humbert devient le tuteur de Lolita et l’emmène dans un périple à travers les États-Unis, abusant d’elle de motel en motel. Lolita finit par s’enfuir avec un autre homme. Des années plus tard, Humbert la retrouve, mariée et enceinte à 17 ans. Fou de jalousie, il tue l’homme qui l’avait enlevée jadis. Incarcéré pour meurtre, Humbert rédige ses mémoires, confession d’une passion illicite.
Avec un style éblouissant, Nabokov dépeint la dérive d’un esprit torturé, mêlant le sublime au sordide, le lyrisme à l’abject. Sulfureux chef-d’œuvre, « Lolita » est un classique absolu de la littérature.
Aux éditions FOLIO ; 551 pages.
2. Ada ou l’Ardeur (1969)
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« Ada ou l’Ardeur », chronique familiale de Vladimir Nabokov, entrelace avec virtuosité les destins d’Ada et Van, demi-frère et sœur épris l’un de l’autre dès l’adolescence. Sur fond d’une Amérique fantasmée, Antiterra, où se mêlent références russes et américaines, l’auteur dépeint leur passion transgressive et tumultueuse.
Été 1884, domaine d’Ardis. Les jeunes Ada et Van se rencontrent, se désirent éperdument. Leur amour fulgurant et charnel, marqué par des jeux érotiques d’une intensité rare, les consume. Mais les non-dits familiaux et l’interdit de l’inceste menacent leur idylle. Au fil des décennies, séparations déchirantes et retrouvailles fiévreuses rythment leur existence.
Rédigé par un Van nonagénaire, le récit de cette passion abonde en digressions, références littéraires et jeux de mots. L’inventivité de la prose nabokovienne, servie par une érudition jouissive, suscite une lecture exigeante mais grisante. Œuvre singulière et foisonnante, « Ada ou l’Ardeur » révèle un écrivain au sommet de son art.
Aux éditions FOLIO ; 768 pages.
3. La défense Loujine (1930)
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Berlin, années 1920. Loujine, jeune Russe exilé, mène une existence en marge, incompris de ses pairs et de sa famille. Un jour, il découvre les échecs. C’est la révélation. Son génie pour ce jeu s’impose rapidement et il entame une carrière de joueur professionnel qui le mène aux quatre coins de l’Europe.
Mais le don de Loujine est aussi sa malédiction. Bientôt, les échecs envahissent son esprit. Il ne perçoit plus le monde qu’à travers le prisme de l’échiquier. Chaque situation, chaque interaction devient une partie à jouer, une combinaison à élaborer. La frontière entre réel et imaginaire s’estompe dangereusement.
L’arrivée de Natalia dans sa vie semble lui offrir une échappatoire. Leur mariage apparaît comme une bouée de sauvetage, un moyen de s’extraire de l’emprise du jeu. Mais alors que Loujine s’apprête à disputer un tournoi majeur face à un grand maître italien, son obsession refait surface avec une violence inouïe. Un délire paranoïaque qui menace de le faire sombrer définitivement.
Aux éditions FOLIO ; 281 pages.
4. Feu pâle (1962)
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Dans ce roman atypique publié en 1962, Vladimir Nabokov joue avec les codes. « Feu pâle » n’est pas un roman conventionnel mais une œuvre expérimentale en trois actes. Le premier est une préface signée par un certain Charles Kinbote, éditeur autoproclamé du poème éponyme qui constitue le cœur du livre. Composé de 999 vers, ce poème est l’œuvre ultime de John Shade, écrivain et professeur récemment assassiné.
Le dernier tiers, le plus substantiel, rassemble les commentaires et digressions de Kinbote. S’y dessine le portrait en creux d’un homme mégalomane, excentrique et paranoïaque. Ancien roi du lointain pays de Zembla contraint à l’exil, Kinbote vit reclus, obsédé par son passé. Il voue une admiration sans bornes à son illustre voisin Shade, qu’il considère comme son ami et confident. Pourtant, les notes de Kinbote, censées éclairer le texte, versent dans le délire interprétatif. Prisme déformant, Kinbote plaque ses propres préoccupations sur les vers et s’imagine en être l’inspirateur.
Fable extravagante, farce déjantée, le roman multiplie les mises en abyme et sème le doute. Tour de force métafictionnel, « Feu pâle » questionne le processus créatif et tourne en dérision l’exégèse littéraire. Nabokov y déploie toute sa virtuosité et son génie des faux-semblants.
Aux éditions FOLIO ; 352 pages.
5. La méprise (1934)
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Allemagne, années 30. Hermann, 35 ans, négociant en cacao et dandy suffisant, vit avec Lydia, une épouse aussi sotte que soumise. Criblé de dettes, ce beau parleur narcissique manigance l’arnaque de sa vie quand il tombe nez à nez avec Félix, un clochard qui est son parfait sosie. Son plan : occire son double, faire passer sa mort pour la sienne, et permettre à sa veuve d’empocher le pactole de l’assurance-vie.
Ce beau plan, digne des intrigues de Conan Doyle, est révélé sans fard dès les premières pages par le héros mégalomane, qui prétend réaliser le crime parfait. Mais à mesure que se déploie son récit égocentrique, ponctué de digressions sur l’art d’écrire un polar, le lecteur se perd dans les méandres d’un esprit pervers et dissocié. La frontière entre faits et affabulations s’estompe.
Virtuose de la langue, Vladimir Nabokov tisse une histoire aux allures de thriller psychologique, qui épingle avec un humour grinçant la suffisance et la folie. Publié en russe en 1934 et méconnu du grand public, ce court roman annonce les œuvres majeures de l’écrivain et son goût pour les narrateurs douteux.
Aux éditions FOLIO ; 256 pages.
6. Pnine (1957)
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Professeur russe émigré aux États-Unis dans les années 1950, Timofey Pnine enseigne tant bien que mal dans une modeste université américaine. Ce personnage attachant et décalé, au physique singulier, enchaîne les mésaventures avec un mélange de candeur et de maladresse. Pnine puise sa joie de vivre dans les souvenirs de sa Russie natale, tout en peinant à s’adapter à son pays d’accueil.
À travers les yeux de ce anti-héros aux allures de Professeur Tournesol, Nabokov brosse un portrait tendre et amusé de la communauté des exilés russes. Il égratigne au passage le monde universitaire, entre mesquineries et luttes d’ego. Mais derrière l’apparente légèreté du ton se dessine en filigrane une profonde mélancolie, celle d’un homme brisé par les tourments de l’Histoire.
Entre comédie loufoque et chronique douce-amère, « Pnine » est un bijou d’écriture ciselé par la plume virtuose de Nabokov.
Aux éditions FOLIO ; 267 pages.
7. La vraie vie de Sebastian Knight (1941)
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Londres, 1936. Deux mois après la disparition de Sebastian Knight, écrivain brillant et mystérieux, son demi-frère se lance un défi audacieux : reconstituer la vie de cet homme qu’il admirait tant, mais qu’il n’a finalement que peu connu. Manuscrits, témoignages, souvenirs épars… Il rassemble patiemment les pièces du puzzle.
De Cambridge aux cercles littéraires parisiens, le narrateur suit les traces de Sebastian. Il s’immerge dans son œuvre, interroge les femmes qui ont compté, pour tenter de percer le secret de ce frère insaisissable. Et alors qu’il progresse dans sa biographie, une troublante symétrie se dessine entre le destin de Sebastian et le sien.
Premier roman écrit en anglais par Vladimir Nabokov, « La vraie vie de Sebastian Knight » pose un regard pénétrant sur les frontières poreuses entre réel et imaginaire. Servi par une langue d’une virtuosité éblouissante, ce texte inclassable offre une réflexion aussi profonde que malicieuse sur l’art, la mémoire, et l’éternel mystère d’autrui.
Aux éditions FOLIO ; 320 pages.
8. Chambre obscure (1932)
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Publié pour la première fois en russe en 1932, « Chambre obscure » conte la descente aux enfers d’un homme proche de la cinquantaine, ravagé par une passion dévorante. Bruno Kretchmar, éminent critique d’art, coule des jours paisibles à Berlin auprès de son épouse aimante et de sa fille chérie. Une rencontre au cinéma bouleverse son existence : subjugué par Magda, une ouvreuse de 16 ans à la beauté insolente, il perd pied.
Entêté, Kretchmar n’a de cesse de séduire l’adolescente qui cède, surtout attirée par son argent. S’ensuit une relation toxique où le quinquagénaire s’abandonne tandis que la jeune fille, rusée et vénale, le manipule. Magda s’installe chez lui, dépense sans compter, le trompe avec un ancien amant. Mais aveuglé par son désir, sourd aux mises en garde, Kretchmar court à sa perte.
Avec un style incisif, Nabokov brosse le sombre portrait d’un amour toxique. Le récit cruel et tragique de cette obsession à l’issue fatale préfigure son célèbre roman « Lolita ».
Aux éditions GRASSET ; 241 pages.