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Gottfried Wilhelm Leibniz en 6 livres majeurs – Notre sélection

Gottfried Wilhelm Leibniz en 6 livres – Notre sélection

Gottfried Wilhelm Leibniz (1646-1716) est l’un des plus grands esprits de l’histoire. Né à Leipzig dans une famille luthérienne, il perd son père à l’âge de six ans et se forme en autodidacte dans la bibliothèque paternelle. Enfant précoce, il entre à l’université de Leipzig à 14 ans où il étudie le droit, la philosophie et les mathématiques.

Après avoir obtenu son doctorat en droit, il entre au service de l’électeur de Mayence. Un séjour déterminant à Paris (1672-1676) lui permet de rencontrer les plus grands savants de son époque et de développer ses recherches en mathématiques, notamment le calcul infinitésimal qu’il découvre indépendamment de Newton.

En 1676, il devient bibliothécaire et conseiller du duc de Hanovre, poste qu’il occupera jusqu’à sa mort. Travailleur infatigable, il excelle dans de nombreux domaines : philosophie, mathématiques, physique, droit, histoire, théologie. Il développe une métaphysique originale fondée sur le concept de monade et l’idée d’harmonie préétablie. En mathématiques, il invente le calcul infinitésimal et le système binaire. Il conçoit également une machine à calculer capable d’effectuer les quatre opérations.

Philosophe rationaliste, il est connu pour sa théodicée et sa conception optimiste du « meilleur des mondes possibles », que Voltaire raillera dans « Candide ». Leibniz entretient une correspondance considérable avec les savants et souverains de toute l’Europe. Il œuvre pour la réunification des Églises et contribue à la création de l’Académie des sciences de Berlin.

Malgré sa renommée, il meurt relativement isolé à Hanovre en 1716. Son œuvre immense (environ 50 000 écrits dont 15 000 lettres) n’est toujours pas intégralement publiée. Il est considéré comme le dernier « génie universel » de l’histoire, ayant excellé dans presque tous les domaines du savoir de son temps.

Voici notre sélection de ses livres majeurs.


1. Discours de métaphysique (1686)

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Le « Discours de métaphysique » se présente comme une méditation systématique sur la nature de Dieu, la création et l’ordre du monde. À travers 37 articles minutieusement articulés, Leibniz développe une vision complète de l’univers et de ses lois fondamentales. Au cœur de sa réflexion se trouve l’idée d’un Dieu parfaitement rationnel qui agit toujours pour le meilleur, créant ainsi le meilleur des mondes possibles.

L’ouvrage s’ouvre sur une analyse de la perfection divine et de ses implications. Leibniz démontre que Dieu, être absolu, ne peut agir que selon des règles de bonté objectives – et non arbitraires. Cette conception le mène à examiner la nature des substances individuelles, qu’il définit comme des entités autonomes exprimant chacune l’univers entier depuis leur point de vue particulier. La question de la liberté humaine face à la prescience divine occupe une place centrale : comment concilier le libre arbitre avec un monde entièrement déterminé par la sagesse divine ?

Les derniers articles abordent la distinction entre les esprits (substances rationnelles) et les autres créatures, pour culminer dans une vision de l’univers comme « cité de Dieu » – une république parfaite dont les citoyens sont les esprits raisonnables.

Ce texte de Leibniz constitue la première exposition systématique de sa métaphysique mature. Rédigé initialement pour le théologien Antoine Arnauld, il ne lui fut transmis que sous forme d’un résumé en 37 points qui donna lieu à une correspondance philosophique majeure. L’œuvre ne fut redécouverte qu’au milieu du XIXe siècle, mais son influence sur la pensée occidentale s’avéra considérable : elle préfigure la notion moderne de perspective individuelle et pose les bases d’une conception rationnelle de l’univers qui marquera profondément les Lumières.

Aux éditions FOLIO ; 516 pages.


2. Nouveaux Essais sur l’entendement humain (1765)

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Les « Nouveaux Essais sur l’entendement humain », rédigés par Leibniz en 1704, constitue une réfutation systématique de l’ « Essai sur l’entendement humain » de John Locke paru en 1689. L’ouvrage prend la forme d’un dialogue entre deux personnages : Philalèthe, qui défend les positions empiristes de Locke, et Théophile, porte-parole des thèses rationalistes de Leibniz.

Le débat central oppose deux conceptions de l’esprit humain. Pour Locke, défendu par Philalèthe, l’esprit est comparable à une tablette vide (tabula rasa) sur laquelle l’expérience et les sens viennent imprimer leurs marques. À l’inverse, Théophile soutient que l’âme contient déjà en elle-même les principes fondamentaux de la connaissance, que l’expérience ne fait que réveiller. Cette opposition structure l’ensemble de l’ouvrage, qui examine méthodiquement chaque argument de Locke pour lui opposer une réfutation construite.

L’enjeu majeur réside dans la question de l’origine de nos connaissances : proviennent-elles uniquement de l’expérience sensible, comme le pense Locke, ou existe-t-il des vérités innées inscrites dans notre esprit ? Leibniz développe notamment l’exemple des vérités mathématiques, qui selon lui ne peuvent dériver de la seule expérience mais témoignent de principes rationnels présents en nous.

Le destin éditorial de ce texte illustre parfaitement l’éthique intellectuelle de Leibniz. Terminé en 1704, l’ouvrage ne sera publié qu’en 1765, bien après la mort de son auteur. Cette publication tardive s’explique par le décès de Locke survenu en 1704 : jugeant qu’un débat philosophique nécessite la possibilité d’une réponse de l’adversaire, Leibniz préfère garder le manuscrit dans ses tiroirs. Cette anecdote révèle la conception très particulière que Leibniz se faisait de la dispute intellectuelle, conçue comme un véritable dialogue plutôt qu’une simple réfutation. Le texte lui-même témoigne de cette approche : loin d’attaquer frontalement Locke, Leibniz commence souvent par reconnaître la valeur de ses arguments avant d’en montrer les limites, dans un style empreint de diplomatie qui reflète son expérience des négociations politiques européennes.

Aux éditions FLAMMARION ; 441 pages.


3. Monadologie (1714)

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Rédigée en français en 1714, la « Monadologie » constitue l’aboutissement de la pensée métaphysique de Gottfried Wilhelm Leibniz. L’ouvrage, composé de 90 paragraphes concis, présente une vision systématique de l’univers à travers le concept de monade, une substance simple et indivisible qui forme la base de toute réalité.

Leibniz développe sa théorie en partant des monades élémentaires jusqu’à Dieu, la monade suprême. Ces entités, dépourvues de dimensions physiques, possèdent deux caractéristiques essentielles : la perception et l’appétition (le désir de passer d’une perception à une autre). Certaines monades, plus perfectionnées, accèdent à la conscience d’elles-mêmes et deviennent des âmes. Au sommet de cette hiérarchie se trouvent les esprits, capables de raisonner et de comprendre les vérités éternelles. L’harmonie entre toutes ces monades est assurée par Dieu, qui a créé « le meilleur des mondes possibles ».

Cette œuvre n’était pas destinée à la publication : Leibniz l’a rédigée pour le prince Eugène de Savoie-Carignan, souhaitant lui offrir un condensé de sa métaphysique. Le texte original en français est resté inconnu pendant plus d’un siècle, circulant d’abord en traductions allemande (1720) et latine (1721). La redécouverte du manuscrit français en 1840 a permis de mesurer l’ampleur des modifications introduites par les traducteurs. L’influence de ce texte court s’est révélée considérable : il a suscité l’admiration des philosophes rationalistes tout en s’attirant les critiques acerbes de Voltaire, notamment dans « Candide », où l’optimisme leibnizien est tourné en dérision. Emmanuel Kant y verra plus tard l’exemple même du « dogmatisme » philosophique, tandis que Christian Wolff en fera la base de son système.

Aux éditions FOLIO ; 516 pages.


4. Essais de Théodicée (1710)

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Les « Essais de Théodicée », publiés en 1710, constituent l’œuvre majeure du philosophe allemand Gottfried Wilhelm Leibniz sur la question du mal et de la justice divine. Dans cet ouvrage qui fait suite à des échanges avec la reine Sophie-Charlotte de Prusse, Leibniz affronte une question cruciale de la théologie chrétienne : comment concilier l’existence d’un Dieu infiniment bon et tout-puissant avec la présence du mal dans le monde ?

Pour répondre à cette interrogation, Leibniz développe une argumentation méthodique qui s’articule autour de trois types de mal : le mal métaphysique (les imperfections inhérentes à toute créature), le mal physique (la souffrance) et le mal moral (le péché). Sa thèse centrale affirme que notre monde, malgré ses imperfections apparentes, est « le meilleur des mondes possibles ». Non pas que ce monde soit parfait, mais parmi tous les univers que Dieu aurait pu créer, celui-ci représente l’équilibre optimal entre le bien et le mal nécessaire.

L’originalité de sa démonstration repose sur l’idée que Dieu, dans sa sagesse infinie, a choisi de créer ce monde précis parmi une infinité de mondes possibles, car il représentait la meilleure combinaison concevable. Les maux qui s’y trouvent ne sont pas voulus pour eux-mêmes mais permis car ils contribuent à un plus grand bien, comme les ombres sont nécessaires à la beauté d’un tableau.

Cette œuvre s’inscrit dans un contexte particulier : elle répond notamment aux critiques du philosophe Pierre Bayle qui, dans son « Dictionnaire historique et critique », avait soulevé des objections majeures contre la possibilité de justifier rationnellement la bonté divine face au mal. La « Théodicée » représente ainsi la première tentative systématique de répondre à ce défi intellectuel, créant au passage un nouveau terme philosophique – « théodicée » signifiant littéralement « justice de Dieu ».

Aux éditions FLAMMARION ; 506 pages.


5. Système nouveau de la nature et de la communication des substances (1695)

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Dans ces deux textes publiés à la fin du XVIIe siècle dans le « Journal des Savants », Leibniz expose sa théorie révolutionnaire de l’harmonie préétablie, qui propose une solution audacieuse au problème de la communication entre l’âme et le corps. Le philosophe allemand y développe l’idée que chaque substance, qu’il s’agisse d’une âme ou d’un corps, possède une force interne qui lui permet d’agir de manière autonome, tout en restant parfaitement coordonnée avec les autres substances de l’univers grâce à un ordre divin établi dès la création.

La démonstration s’articule autour de plusieurs concepts clés : les « unités réelles » ou « formes substantielles » qui constituent la véritable nature des êtres vivants, la spontanéité des substances qui agissent selon leurs propres lois internes, et l’harmonie universelle qui assure la correspondance parfaite entre toutes les substances sans qu’elles interagissent directement. Leibniz compare ce système à des horloges parfaitement synchronisées qui, sans communication directe, marquent la même heure grâce à leur réglage initial.

« L’Éclaircissement » de 1696 vient préciser et défendre cette théorie face aux objections du philosophe Simon Foucher. Leibniz y insiste sur la nécessité logique de son système et sur ses avantages par rapport aux autres théories de son temps, notamment celle des causes occasionnelles défendue par les cartésiens. Il y approfondit également sa conception des lois de la nature et du mouvement.

Ces textes s’inscrivent dans un contexte intellectuel marqué par la révolution scientifique et les débats sur le mécanisme cartésien. La théorie de l’harmonie préétablie constitue une tentative originale de concilier la nouvelle physique mécaniste avec une métaphysique qui préserve l’autonomie et la spontanéité des êtres vivants. Elle exercera une influence considérable sur la philosophie allemande ultérieure, notamment sur Kant et l’idéalisme allemand.

Aux éditions FLAMMARION ; 279 pages.


6. Principes de la nature et de la grâce fondés en raison (1714)

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C’est à Vienne, en 1714, que Leibniz rédige les « Principes de la nature et de la grâce fondés en raison » à la demande du prince Eugène de Savoie. Ce court traité métaphysique en 18 articles synthétise l’essentiel de sa philosophie mature. Le texte circule d’abord sous forme manuscrite dans les cercles intellectuels avant sa première publication en 1718 dans « L’Europe savante », quatre ans après sa rédaction.

Le propos s’articule autour de questions fondamentales : qu’est-ce qui constitue la réalité ? Comment s’organisent les substances ? Quel rapport unit l’âme et le corps ? Leibniz y développe sa théorie des monades, ces unités simples et indestructibles qui forment la trame du réel. Il montre comment ces substances sont douées de perception et s’accordent entre elles selon une harmonie préétablie. Le texte s’élève progressivement des considérations sur la matière vers des réflexions sur Dieu, l’âme et le rapport entre ordre naturel et ordre divin.

Ce qui distingue les « Principes de la nature et de la grâce fondés en raison » d’autres écrits leibniziens, c’est leur caractère synthétique et pédagogique. En quelques pages seulement se déploient les principaux concepts de sa pensée : les monades, l’harmonie préétablie, la théorie de la connaissance. Le texte fut longtemps confondu avec un autre opuscule majeur, la « Monadologie », rédigé la même année. Cette confusion persista jusqu’en 1885, quand le philologue Carl Gerhardt établit définitivement leur distinction.

Aux éditions PUF ; 160 pages.

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