Cormac McCarthy (1933-2023) est l’un des écrivains américains les plus influents du XXe siècle. Né à Providence, Rhode Island, il grandit dans une famille de six enfants. Après des études à l’Université du Tennessee et un service dans l’US Air Force, il se consacre à l’écriture.
Son premier roman, « Le Gardien du verger », paraît en 1965. Auteur d’une œuvre puissante marquée par la violence et les grands espaces de l’Ouest américain, il connaît la consécration avec « Méridien de sang » (1985) et « La trilogie des confins », dont « De si jolis chevaux » remporte le National Book Award en 1992. Son roman « La Route » lui vaut le prix Pulitzer en 2007. Plusieurs de ses œuvres sont adaptées avec succès au cinéma, notamment « No Country for Old Men » par les frères Coen.
McCarthy s’éteint à Santa Fe, Nouveau-Mexique, où il résidait avec sa troisième épouse et leur fils.
Voici notre sélection de ses romans majeurs.
1. La Route (2006)
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Un père et son jeune fils errent sur les routes d’une Amérique méconnaissable, dévastée par un cataclysme qui a transformé le monde en un désert de cendres. Le ciel, perpétuellement gris, masque un soleil devenu pâle et froid. La végétation a disparu, les animaux sont morts. Les rares humains encore en vie se terrent ou, pour la plupart, se sont transformés en chasseurs impitoyables prêts à tout pour survivre.
Dans ce monde hostile, les deux personnages – que l’auteur ne nomme jamais – cheminent vers le sud en quête d’un hypothétique refuge. Ils transportent leurs maigres possessions dans un caddie de supermarché : quelques conserves, des couvertures, et un revolver avec deux balles. Le père, rongé par la maladie, tente désespérément de préserver l’innocence de son fils et de lui transmettre des valeurs morales, alors même que l’humanité semble avoir sombré dans la barbarie.
« La Route », roman de Cormac McCarthy paru en 2006, a obtenu le prix Pulitzer. Dans une écriture dépouillée, l’auteur compose une œuvre percutante sur l’amour d’un père pour son fils. À travers leur relation se dessine la possibilité d’une survie de l’humanité, non pas physique mais morale, dans un monde où tout semble perdu.
Aux éditions POINTS ; 256 pages.
2. Méridien de sang (1985)
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Dans l’Amérique de 1850, un adolescent de quatorze ans fuit son foyer du Tennessee et part vers le Texas. Sans nom (jamais son nom n’est mentionné, tout au long du livre, c’est « the kid ») ni instruction, il rejoint une bande de mercenaires commandée par le capitaine Glanton. La petite troupe gagne sa vie en chassant et en scalpant les Indiens pour le compte des autorités.
Cette troupe d’hommes hirsutes et violents traverse les déserts du Sud des États-Unis et du Nord du Mexique, laissant dans son sillage un chapelet de massacres sanglants. Payés au scalp par les gouverneurs locaux, ils tuent sans discrimination Indiens, Mexicains et colons, hommes, femmes et enfants. La violence est leur mode d’existence.
Le roman de McCarthy, inspiré de faits réels, dépeint avec une brutalité glaçante cette période sombre de la conquête de l’Ouest américain. Son écriture singulière mêle descriptions somptueuses des paysages et scènes d’une violence inouïe.
Aux éditions POINTS ; 480 pages.
3. No Country for Old Men (2005)
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Dans les étendues désertiques du Texas, à la frontière mexicaine, Llewelyn Moss fait une découverte qui va bouleverser sa vie. Au début des années 1980, cet ancien combattant de la guerre du Viêt Nam tombe par hasard sur une scène macabre : des véhicules criblés de balles, des cadavres, des sacs remplis d’héroïne et une mallette contenant plus de deux millions de dollars. Pour lui qui vit dans une caravane avec sa jeune femme, la tentation est trop forte.
Cette décision le précipite dans une course-poursuite infernale. Sur ses traces, Anton Chigurh, un tueur psychopathe d’une froideur absolue, est bien décidé à récupérer l’argent pour le compte des trafiquants. Armé d’un pistolet d’abattage, il laisse derrière lui une traînée de cadavres, éliminant sans état d’âme quiconque croise sa route.
Entre les deux hommes, le shérif Ed Tom Bell tente de comprendre et d’arrêter cette spirale meurtrière. Vétéran de la Seconde Guerre mondiale proche de la retraite, il observe avec amertume la montée inexorable de la violence dans son pays. Ses réflexions désabusées ponctuent ce récit noir qui brosse le portrait d’une Amérique en pleine mutation, où les codes moraux s’effacent devant la puissance de l’argent et la sauvagerie des cartels de drogue.
Aux éditions POINTS ; 320 pages.
4. La trilogie des confins – De si jolis chevaux (1992)
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Au Texas, à l’orée des années 1950, John Grady Cole voit son univers s’effondrer. À seize ans, ce jeune homme épris de chevaux et d’espaces sauvages apprend que le ranch familial va être vendu. Refusant de se soumettre à cette modernité qui signe la fin d’un mode de vie, il décide de partir vers le Mexique avec son ami Lacey Rawlins.
Sur les routes poussiéreuses, les deux adolescents croisent le chemin d’un mystérieux garçon de treize ans, Jimmy Blevins, monté sur un magnifique cheval qui ne lui appartient manifestement pas. Cette rencontre marque le début d’une suite d’événements qui les mènera bien au-delà de leurs rêves d’aventure initiaux.
Ce premier volet de « La trilogie des confins » est servi par une écriture âpre marquée par l’absence quasi totale de ponctuation. McCarthy y brosse le portrait d’une Amérique des années 1950 où la modernité efface peu à peu les dernières traces du Far West, où les chevaux cèdent peu à peu leur place aux automobiles. Un roman puissant sur la perte de l’innocence, porté par une langue aussi rude que les paysages qu’elle décrit.
Aux éditions POINTS ; 408 pages.
5. La trilogie des confins – Le grand passage (1994)
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Dans les années 1940, aux confins du Nouveau-Mexique, la famille Parham mène une existence paisible jusqu’au jour où une louve commence à s’attaquer à leur bétail. Billy, le fils aîné âgé de dix-sept ans, parvient à la capturer. Mais face à l’animal blessé, l’adolescent prend une décision qui bouleversera sa vie : plutôt que de l’abattre, il choisit de la ramener sur ses terres d’origine, au Mexique.
Ce périple à travers les terres arides n’est que le début d’une succession d’épreuves. À son retour, Billy découvre que ses parents ont été assassinés et leurs chevaux volés. Accompagné de son frère Boyd, quinze ans, il repart vers le sud dans l’espoir de retrouver les bêtes dérobées.
Dans ce deuxième volet de « La trilogie des confins », Cormac McCarthy déploie son style caractéristique : phrases dépouillées, ponctuation minimaliste, dialogues en espagnol non traduits. Il ausculte une fois encore la nature humaine dans ce qu’elle a de plus noble et de plus sombre, à travers le regard de deux adolescents confrontés trop tôt à la violence des hommes.
Aux éditions POINTS ; 528 pages.
6. La trilogie des confins – Des villes dans la plaine (1998)
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Dans le Nouveau-Mexique des années 1950, deux cow-boys, John Grady Cole et Billy Parham, travaillent ensemble dans un ranch menacé d’expropriation par l’armée américaine. Ces hommes du grand Ouest parcourent les terres à cheval, s’occupent du bétail et mènent une existence rude mais libre, perpétuant les traditions d’un monde en déclin. Leurs soirées de détente les conduisent régulièrement au Mexique voisin, dans les bordels de Ciudad Juárez.
C’est là que John Grady croise le regard de Magdalena, une jeune prostituée mexicaine de seize ans. Belle mais fragile, sujette à des crises d’épilepsie, elle ne parle pas un mot d’anglais et vit sous l’emprise d’Eduardo, son proxénète. John tombe éperdument amoureux d’elle et forme le projet insensé de l’épouser, de l’emmener avec lui aux États-Unis. Billy tente en vain de le raisonner avant d’accepter de l’aider, conscient que cette histoire ne peut que mal finir.
Cormac McCarthy clôt « La trilogie des confins » avec ce roman au style caractéristique, fait de phrases brèves et de dialogues dépouillés. L’histoire alterne entre la rudesse du travail au ranch, la beauté sauvage des paysages et la noirceur des villes frontalières. À travers cette quête impossible se dessine le portrait de deux hommes liés par une amitié indéfectible, derniers représentants d’un mode de vie condamné.
Aux éditions POINTS ; 384 pages.
7. Suttree (1979)
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Dans les années cinquante, aux marges de Knoxville, Tennessee, Cornelius Suttree mène une existence précaire sur une barge aménagée. Ancien détenu issu d’une famille aisée qui l’a renié, il survit en pêchant des poissons-chats dans les eaux polluées de la rivière. Son quotidien s’écoule entre ses tournées de pêche, la vente de ses prises au marché et les soirées d’ivresse dans les bars sordides de la ville.
Le long des berges du Tennessee se rassemble tout un monde de déclassés : chômeurs, ivrognes, petits malfrats et vagabonds. Parmi eux, Gene Harrogate, un jeune homme simple d’esprit tout juste sorti de prison pour avoir vandalisé un champ de pastèques. Entre deux gorgées de whisky frelaté, Suttree tente d’empêcher son nouveau protégé de retourner derrière les barreaux.
Publié en 1979 après vingt ans d’écriture, ce roman de Cormac McCarthy brosse le portrait d’une Amérique méconnue, celle des laissés-pour-compte du miracle économique d’après-guerre. Un roman majeur qui s’inscrit dans la lignée de Faulkner.
Aux éditions POINTS ; 640 pages.
8. L’obscurité du dehors (1968)
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Dans les montagnes des Appalaches, au cœur d’une Amérique rurale et désolée, Culla et Rinthy Holme survivent tant bien que mal dans une cabane délabrée. Frère et sœur unis par des liens incestueux, ils doivent faire face aux conséquences de leur relation le jour où Rinthy met au monde un enfant.
Culla décide d’abandonner le nouveau-né dans la forêt, mais un colporteur de passage le trouve et l’emporte avec lui. Lorsque Rinthy découvre que son bébé n’est pas mort comme le prétendait son frère, elle part sur les routes à sa recherche. De son côté, Culla se lance à la poursuite de sa sœur.
Avec ce deuxième roman publié en 1968, Cormac McCarthy dépeint un Sud américain impitoyable, hanté par la barbarie et le désespoir. Le bien et le mal s’y affrontent sans répit dans un territoire hostile qui semble avoir été abandonné par Dieu.
Aux éditions POINTS ; 240 pages.
9. Un enfant de Dieu (1973)
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Dans le Tennessee des années 1960, Lester Ballard vient de se faire expulser de la ferme familiale. Sans le sou, cet homme solitaire trouve refuge dans une cabane délabrée, puis dans les grottes de la montagne. Pour subsister, il braconne, vole du maïs et erre dans la région, son fusil comme seul compagnon.
Sa descente dans l’horreur commence le jour où il découvre un couple mort dans une voiture. Un désir morbide s’empare alors de lui : il profane le cadavre de la femme. Ce premier passage à l’acte va déclencher une spirale macabre.
Entre pitié et répulsion, le lecteur suit ce personnage qui s’enfonce toujours plus loin dans la bestialité. McCarthy s’est inspiré d’une histoire vraie pour dépeindre avec une froideur clinique cet « enfant de Dieu » devenu prédateur.
Aux éditions POINTS ; 192 pages.
10. Le passager (2022)
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Dans le Golfe du Mexique en 1980, Bobby Western, un ancien physicien reconverti en plongeur professionnel, inspecte l’épave d’un avion de ligne échoué en eaux peu profondes. Sur place, il constate des anomalies : la boîte noire a disparu et un passager manque à l’appel. Peu après, des agents fédéraux commencent à le harceler, son appartement est fouillé et son collègue meurt dans des circonstances suspectes.
Mais cette enquête n’est qu’un prétexte pour dévoiler l’histoire tourmentée de Bobby, hanté par le suicide de sa sœur Alicia dix ans plus tôt. Génie des mathématiques internée à l’institut psychiatrique Stella Maris, elle entretenait avec son frère une relation fusionnelle qui frôlait l’inceste. En alternance avec le récit principal, des chapitres en italique relatent les conversations hallucinées d’Alicia avec le « Thalidomide Kid », un être imaginaire à nageoires qui dirige une troupe de personnages fantasmagoriques.
Le roman mêle plusieurs fils narratifs : la fuite de Bobby poursuivi par des forces obscures, son deuil impossible, et l’ombre du père, scientifique qui collabora avec Oppenheimer à la création de la bombe atomique. À travers de longs dialogues philosophiques dans les bars de La Nouvelle-Orléans, McCarthy compose une méditation mélancolique sur la culpabilité, la solitude et les limites de la science face aux mystères de l’existence.
Aux éditions POINTS ; 528 pages.
11. Stella Maris (2022)
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À l’automne 1972, une jeune femme de 20 ans franchit les portes de Stella Maris, un établissement psychiatrique du Wisconsin. Elle s’appelle Alicia Western, une mathématicienne qui a choisi de s’y faire interner. Diagnostiquée schizophrène, elle est suivie par le Dr Cohen avec qui elle entame une série de séances thérapeutiques.
Le roman retranscrit leurs conversations, sans narration ni description. Au fil des entretiens se dessine le portrait d’une intelligence hors norme : enfant précoce devenue mathématicienne de haut vol, Alicia a côtoyé les plus grands cerveaux de son époque. Mais ses démons la rattrapent. Elle est visitée la nuit par des créatures imaginaires menées par le « Thalidomide Kid ». Et surtout, elle nourrit pour son frère Bobby un amour qui dépasse la simple affection fraternelle.
Dans l’ombre de ces tourments plane l’histoire familiale : leur père, éminent physicien, a participé à la conception de la bombe atomique aux côtés d’Oppenheimer. Entre réflexions scientifiques pointues et confessions intimes, ce dialogue thérapeutique compose le deuxième tome d’un diptyque complété par « Le passager », qui raconte le destin de Bobby dix ans plus tard.
Aux éditions POINTS ; 240 pages.