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Tim Powers en 2 romans – Notre sélection

Tim Powers en 2 romans – Notre sélection

Tim Powers naît le 29 février 1952 à Buffalo dans l’État de New York. Il grandit en Californie où sa famille déménage en 1959. Pendant ses études de littérature anglaise à l’université d’État de Californie à Fullerton, il rencontre deux amis importants, K. W. Jeter et James Blaylock, avec qui il invente le personnage de William Ashbless. C’est également durant cette période qu’il fait la connaissance de Philip K. Dick, qui s’inspire de lui pour le personnage de David dans son roman « SIVA ».

Son premier roman majeur, « Les Chevaliers de la brune », paraît en 1979, mais c’est « Les Voies d’Anubis » (1983) qui le révèle au public et lui vaut le Prix Philip-K.-Dick. Son univers se caractérise par l’intégration de personnages et de faits historiques dans des intrigues fantastiques ou surnaturelles. On y trouve ainsi des figures comme Lord Byron, François Villon ou encore le pirate Barbe Noire.

Tim Powers est considéré, avec James Blaylock et  K. W. Jeter, comme l’un des pionniers du steampunk. Il poursuit aujourd’hui sa carrière d’écrivain tout en enseignant à temps partiel à l’école d’arts du comté d’Orange en Californie. Son roman « Sur des mers plus ignorées » (1987) inspire en partie le quatrième volet de la saga « Pirates des Caraïbes ». Il vit actuellement à Muscoy, en Californie, avec sa femme Serena Batsford Powers.

Voici notre sélection de ses romans majeurs.


1. Les Voies d’Anubis (1983)

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Résumé

En 1983, Brendan Doyle, professeur californien spécialiste de poésie anglaise du XIXe siècle, se voit proposer une mission lucrative par le milliardaire J. Cochran Darrow. Sa tâche paraît simple : accompagner un groupe de riches clients lors d’un voyage temporel vers Londres en 1810 pour assister à une conférence donnée par le célèbre poète Samuel Taylor Coleridge.

Le voyage aller se déroule sans encombre, mais au moment du retour, Doyle est kidnappé par une bande de gitans dirigée par le mystérieux Docteur Romany. Abandonné dans un Londres du XIXe siècle qu’il ne connaît qu’à travers ses livres, le professeur doit désormais lutter pour sa survie dans les bas-fonds de la capitale britannique.

Il découvre bientôt que ses ravisseurs sont impliqués dans un complot bien plus vaste : d’anciens sorciers égyptiens cherchent à restaurer leurs dieux et à détruire l’Empire britannique. Romany et ses alliés – notamment Horrabin, un clown maléfique à la tête d’une guilde de mendiants, et Joe Face de Chien, un étrange loup-garou capable de changer de corps – sont les agents de ce plan machiavélique.

Pour Doyle, l’enjeu est double : survivre dans ce Londres hostile et trouver un moyen de revenir à son époque. Sa seule chance réside dans les mystérieuses « Voies d’Anubis », ces brèches temporelles qui permettent de traverser le temps mais que convoitent également ses ennemis…

Autour du livre

Tim Powers écrit « Les Voies d’Anubis » en réutilisant deux manuscrits rédigés quelques années plus tôt pour son premier éditeur, Laser Books. Ces textes devaient initialement faire partie d’une collection de dix volumes sur le roi Arthur se réincarnant à travers l’histoire occidentale. Le premier se déroulait au XVIIIe siècle et le second dans le Londres du XIXe siècle. Powers les fusionne alors en remplaçant Arthur par le personnage de Brendan Doyle. Le roman est publié fin 1983 par Ace Books.

Tim Powers y entrelace science-fiction (voyages temporels), fantasy (magie égyptienne) et littérature britannique du XIXe siècle. Il y fait intervenir des poètes réels comme Coleridge et Lord Byron aux côtés de personnages fictifs. Le thème du voyage dans le temps sert de prétexte pour aborder les paradoxes temporels, traités avec une cohérence remarquable. Powers évite les pièges classiques du genre et construit une mécanique temporelle qui se tient du début à la fin.

L’atmosphère glauque du Londres du début du XIXe siècle constitue l’un des atouts majeurs du livre. Powers s’inspire du reportage « London Labour and the London Poor » du journaliste Henry Mayhew pour créer un tableau saisissant des bas-fonds de la capitale britannique. Le clown Horrabin, chef d’une confrérie de mendiants difformes, s’impose comme une figure cauchemardesque qui pourrait rivaliser avec le « Ça » de Stephen King. La mythologie égyptienne s’invite également à la fête, avec ses divinités, ses rituels et ses concepts comme le « ka » (double spirituel) qui jouent un rôle clé dans l’intrigue.

« Les Voies d’Anubis » a reçu un accueil extrêmement favorable de la part de la critique. Le Times parle d’une « intrigue diaboliquement efficace, une ingéniosité grisante, un rythme d’enfer : ce roman est une performance de virtuose, un feu d’artifice aveuglant ». Thomas Wagner de SF Reviews évoque un « chef-d’œuvre » et loue son « inépuisable richesse d’inventivité ». Alison Flood du Guardian le décrit comme « une aventure passionnante, merveilleusement inventive et bien écrite ».

Le livre a remporté le prestigieux Prix Philip-K.-Dick en 1984, le Prix Science Fiction Chronicle la même année, et le Prix Apollo en 1987. Il est considéré comme le meilleur livre de Tim Powers avec « Sur des mers plus ignorées ». Le site Best Fantasy Books le classe dans son « Top 25 des romans de fantasy des années 1980 », tandis que l’éditeur David Pringle l’inclut dans son livre sur les cent meilleurs romans de fantasy. Il figure également dans la collection Fantasy Masterworks de la maison d’édition Victor Gollancz, qui reprend les classiques de la littérature de l’imaginaire.

« Les Voies d’Anubis » est considéré comme l’un des romans fondateurs du genre steampunk, aux côtés d’ouvrages comme « Homunculus » de James Blaylock et « Machines infernales » de K. W. Jeter. Ces trois romanciers, amis de longue date, ont délibérément écrit sur un thème identique, se livrant à une compétition amicale remportée, selon plusieurs critiques, par Powers.

China Miéville s’en est inspiré pour son roman « Perdido Street Station », tandis que l’écrivain Andy Lane décrit son ouvrage « All-Consuming Fire » comme une « tentative d’imiter Les Voies d’Anubis ». Javier Olivares, créateur de la série télévisée espagnole « Le Ministère du Temps », cite également le livre comme l’une de ses principales inspirations. Une adaptation théâtrale a vu le jour en 2014 au théâtre ExCeL à Londres, mise en scène par Ruth Pe Palileo.

Aux éditions BRAGELONNE ; 475 pages.


2. Sur des mers plus ignorées (1987)

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Résumé

En 1718, John Chandagnac, un marionnettiste français ruiné, embarque pour la Jamaïque. Il entend bien récupérer l’héritage volé par son oncle Sebastian, dont la malversation a précipité la mort de son père. Sur le navire, il rencontre Beth Hurwood et son père Benjamin, ancien professeur d’Oxford obsédé par les sciences occultes.

Le voyage bascule quand leur vaisseau est attaqué par des pirates. Chandagnac blesse leur capitaine lors d’un duel puis se retrouve contraint de rejoindre l’équipage sous peine de mort. Rebaptisé Jack Shandy, il intègre malgré lui le monde brutal de la flibuste.

Dans les Caraïbes, Shandy fait une découverte stupéfiante : contrairement à l’Europe, la magie vaudou y fonctionne réellement. Les pirates l’utilisent couramment pour leurs opérations. Quand Barbe-Noire et Hurwood organisent une expédition vers la légendaire Fontaine de Jouvence en Floride, Shandy les accompagne.

Durant ce périple à travers une jungle ensorcelée, il comprend l’horrible vérité : Hurwood projette d’utiliser la magie de la Fontaine pour ressusciter sa défunte épouse en transférant son âme dans le corps de sa fille Beth. La situation se complique lorsque Leo Friend, un sorcier allié de Hurwood, kidnappe Beth.

Déterminé à sauver la jeune femme dont il est tombé amoureux, Shandy doit apprendre les arcanes du vaudou et naviguer dans un monde où se croisent navires fantômes, équipages de zombies et trahisons incessantes. L’ex marionnettiste va progressivement se transformer en capitaine pirate aguerri, prêt à affronter Barbe-Noire en personne pour sauver Beth du destin macabre qui l’attend.

Autour du livre

Publié en 1987, « Sur des mers plus ignorées » est né après une période difficile pour Tim Powers. L’éditeur Lester del Rey venait en effet de rejeter plusieurs de ses manuscrits, dont « Les Voies d’Anubis ». Powers décida alors d’écrire un roman d’aventures maritimes avec « pirates, zombies, Fontaine de Jouvence, batailles navales et duels au coutelas », pensant que cette formule séduirait davantage l’éditeur. Pari manqué : Lester del Rey le refusa également. Powers s’appuya sur une recherche documentaire méticuleuse concernant la piraterie, le vaudou et l’histoire des Caraïbes. « Je lis toute l’histoire et les biographies que je peux trouver », expliqua-t-il plus tard à propos de sa démarche.

La magie occupe une place prépondérante dans cette œuvre où Powers développe un système original mêlant traditions vaudou et légendes caribéennes. Cette approche s’inscrit parfaitement dans ce qui deviendra sa signature : l’insertion d’éléments surnaturels dans des cadres historiques rigoureusement documentés. Ce que certains critiques nommeront plus tard la « secret history fantasy » ou parfois « hidden history fantasy » – l’idée que derrière les événements historiques connus se cachent des forces occultes. La présence de figures historiques réelles comme Barbe-Noire, Stede Bonnet, Woodes Rogers et Juan Ponce de León (camouflé sous l’identité du gouverneur Sawney) renforce cette impression d’histoire alternative.

« Sur des mers plus ignorées » est également remarquable par sa représentation nuancée de la piraterie, loin des clichés habituels. Powers montre ces hommes comme des individus complexes pris dans les soubresauts de leur époque, symbolisés par le dilemme qui traverse le livre : accepter le pardon royal et abandonner la liberté des océans, ou persister dans une vie de piraterie de plus en plus menacée. Le déclin de la magie face à la modernité occidentale constitue un autre thème majeur, un parallèle entre la fin de l’ère pirate et celle des croyances anciennes.

La psychologie des personnages s’avère particulièrement travaillée, notamment à travers la transformation de John Chandagnac. D’abord homme cultivé mais naïf, il devient progressivement un capitaine pirate aguerri capable de naviguer entre les codes de la piraterie et ceux de la magie. Son évolution reflète l’un des thèmes centraux du livre : l’adaptation à un monde nouveau dont les règles diffèrent radicalement de celles connues. Ses talents de marionnettiste, loin d’être anecdotiques, deviennent symboliquement cruciaux dans sa capacité à comprendre et manipuler les forces surnaturelles qui l’entourent.

La critique accueille favorablement le roman. Orson Scott Card le qualifie de « paroxysme du récit », ajoutant que « Powers écrit dans un style clair et élégant qui illumine sans ralentir l’histoire ». David Langford souligne quant à lui comment le livre « vous happe immédiatement et vous entraîne dans les terribles infortunes d’un personnage sur les mers espagnoles, pour culminer ensuite vers des méga-frissons ». Jack Adrian évoque un mélange « d’aventures en haute mer avec sorcellerie et magie noire ». « Sur des mers plus ignorées » fut nominé pour le World Fantasy Award et se classa deuxième au Prix Locus dans la catégorie roman de fantasy.

Disney acquit les droits du livre pour le quatrième volet de sa franchise « Pirates des Caraïbes » intitulé « La Fontaine de Jouvence » (2011). Ted Elliott et Terry Rossio, scénaristes du film, admirent avoir repris les personnages de Barbe-Noire et de sa fille, ainsi que l’intrigue de la Fontaine de Jouvence, tout en précisant qu’il ne s’agissait pas d’une adaptation directe puisque Jack Sparrow et Barbossa n’apparaissent pas dans le livre. Ron Gilbert, le créateur des jeux vidéo Monkey Island, reconnut que sa principale source d’inspiration était le roman de Powers. 

Aux éditions BRAGELONNE ; 336 pages.

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