Né le 7 novembre 1975 à Paris, Raphaël Haroche, connu sous le nom de Raphaël, est un auteur-compositeur-interprète, musicien et écrivain français. Il grandit à Boulogne-Billancourt puis dans le Marais à Paris, issu d’une famille juive aux origines diverses – alsacienne du côté maternel, marocaine et russe du côté paternel. Son oncle, Serge Haroche, est lauréat du prix Nobel de physique 2012.
Après des études de droit peu passionnantes malgré l’obtention d’un DEA, il se consacre à la musique. Son premier album « Hôtel de l’univers » sort en 2000, mais c’est « Caravane » en 2005 qui le propulse au sommet avec 1,8 million d’exemplaires vendus et trois Victoires de la musique. S’ensuivent plusieurs albums qui confirment son succès, jusqu’au récent « Une autre vie » sorti en mars 2024.
En 2017, Raphaël fait une entrée remarquée en littérature sous son nom complet, Raphaël Haroche. Son premier recueil de nouvelles, « Retourner à la mer », lui vaut le prix Goncourt de la nouvelle. Il poursuit son parcours littéraire avec « Une éclipse » (2021) puis son premier roman « Avalanche » (2023).
Artiste aux multiples facettes, il compose également des musiques de films, notamment pour « Les Cowboys » de Thomas Bidegain, qui lui vaut une nomination aux César. Côté vie privée, il partage la vie de l’actrice Mélanie Thierry depuis 2002, qu’il épouse en 2022. Le couple a trois fils : Roman, Aliocha et Isaac.
Voici notre sélection de ses livres majeurs.
1. Avalanche (roman, 2023)
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À l’automne 1989, Léonard, quinze ans, et son petit frère Nicolas, douze ans, intègrent un pensionnat huppé en Suisse. Orphelins de mère, décédée dans un accident de voiture, délaissés par leur père parti travailler en Amérique du Sud, les deux garçons quittent leur grand-mère d’origine ukrainienne pour rejoindre cette institution réservée aux enfants de familles fortunées. Si Nicolas y obtient une bourse grâce à ses dons exceptionnels pour le piano, Léonard peine à trouver sa place dans cet environnement élitiste.
Face à la cruauté de leurs camarades issus de milieux privilégiés, les deux frères réagissent différemment. Nicolas, fragile et hypersensible, se réfugie dans la musique et la spiritualité, tandis que Léonard s’abandonne aux excès de l’adolescence : alcool, drogue, premières expériences sexuelles. Tourmenté par la culpabilité d’avoir survécu à l’accident qui a coûté la vie à sa mère, l’aîné oscille entre le désir de protéger son cadet et celui de s’intégrer coûte que coûte à ce nouveau monde, quitte à renier ses origines modestes.
Premier roman de Raphaël Haroche, « Avalanche » mêle chronique sociale et roman d’apprentissage. Sur fond d’événements historiques majeurs – chute du mur de Berlin, exécution des Ceausescu, fin du régime Pinochet – le récit dépeint les tourments de l’adolescence dans toute leur complexité : deuil, sexualité naissante, quête identitaire et lutte des classes se conjuguent dans une narration sans concession.
Cette chronique adolescente, qui évite les sentiers battus du genre, marque une nouvelle étape dans le parcours de Raphaël Haroche. Après le succès de ses recueils de nouvelles, notamment « Retourner à la mer » récompensé par le prix Goncourt de la nouvelle, le chanteur-écrivain impose sa voix singulière dans un récit où la violence côtoie la tendresse, où la honte de classe se mêle aux affres du deuil.
Aux éditions FOLIO ; 256 pages.
2. Retourner à la mer (recueil de nouvelles, 2017)
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« Retourner à la mer » rassemble treize nouvelles qui dépeignent des êtres malmenés par l’existence.
Dans « Yuri », un employé d’abattoir sauve un veau de l’abattage mais l’oublie dans l’usine fermée pour le weekend. « L’homme des sables » narre l’histoire d’amour improbable entre un vigile costaud, décrit comme un « gros nounours », et une strip-teaseuse vieillissante dont le corps est couvert de cicatrices. Il la regarde danser au club et supporte difficilement les moqueries des clients à son égard. Dans « Le dernier des pères », un père divorcé alcoolique récupère son petit garçon pour une garde. Dans l’incapacité de s’occuper correctement de l’enfant, la situation dégénère.
« La réserve » raconte une histoire d’amour qui tourne mal, située dans le désert des Agriates en Corse. Dans « L’escalier », un adolescent apprend la mort de son frère malade alors qu’il est en colonie de vacances. « Les orques » est une nouvelle impliquant trois adolescents qui entendent un bruit étrange qui pourrait annoncer la fin du monde. « Rester au lit » narre l’histoire d’un insomniaque qui réfléchit sur sa solitude et la vie de couple. « Lazare » est une nouvelle qui traite de la vie des SDF à Paris.
« Les acacias » relate l’histoire de deux vieillards qui s’échappent d’une maison de retraite. « La plus belle fille du monde » est une nouvelle avec une chute inattendue à propos d’un homme amoureux de la plus belle femme du monde. Dans « Retourner à la mer » (qui donne son titre au recueil), un quadragénaire sort de l’hôpital et part se reposer dans le Sud avec sa mère âgée, qu’il « adore détester ».
Couronné par le Prix Goncourt de la nouvelle en 2017, ce premier livre de Raphaël Haroche marque une incursion réussie dans un genre littéraire peu pratiqué en France. La mélancolie qui imprègne ces textes fait écho à l’univers musical de l’auteur. Les critiques ont particulièrement salué les nouvelles « Le dernier des pères » et « Retourner à la mer », qui donnent à voir avec une sensibilité à fleur de peau les fêlures de personnages ordinaires. La noirceur des situations n’exclut pas quelques touches d’humour grinçant, comme dans cette histoire d’un homme épris de « la plus belle femme du monde ».
Aux éditions FOLIO ; 192 pages.
3. Une éclipse (recueil de nouvelles, 2021)
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Ce recueil de douze nouvelles, paru après « Retourner à la mer » (Prix Goncourt de la nouvelle 2017), trace les contours d’existences ordinaires bouleversées par des moments charnières.
« Une éclipse » narre l’histoire d’un couple de quarantenaires au bord de la mer le jour d’une éclipse solaire. Alors que le soleil s’obscurcit progressivement, leur relation se délite, la femme devenant de plus en plus distante. Dans « Aida », un jeune garçon en croisière en Égypte avec ses parents devient la victime d’un professeur. Le récit est narré à la deuxième personne du singulier, mettant directement le lecteur à la place de l’enfant dont l’innocence est brutalement arrachée.
« Les Patriciens » raconte l’histoire de deux hommes âgés, un narrateur et son aide de camp devenu son amant, vivant dans une maison délabrée. Des restes de corps sont découverts tandis que leur demeure est encerclée de jeunes à moto menaçants. « L’effet de couronne » suit une mère et son fils dans un taxi avec un chauffeur inquiétant. « Les règles du tennis » raconte l’histoire de Seth (jeu de mot avec « set »), un passionné de tennis qui a renoncé à ses ambitions de jeunesse. « Terrain à bâtir » se déroule en Argentine, où le narrateur voyage en Mercedes avec Erik, un ami de son grand-père et célèbre architecte nostalgique de la Suisse Romande. La révélation du passé d’Erik bouleverse le narrateur.
« Une relique » met en scène Claire et le narrateur, dont l’ami plombier Denis, maladroit et hypocondriaque, effectue des réparations dans leur salle de bains. La situation prend un virage inattendu. « Signe particulier » est une courte nouvelle sur un rendez-vous entre un homme et une femme via un site de rencontres. La femme a un « signe particulier » qui devient l’objet de jeux de mots déplacés de la part de l’homme.
Dans « Bowie », Claire, séparée du narrateur cinéaste, l’appelle car leur chien Bowie doit être euthanasié. Le narrateur établit des parallèles entre leur vie et celle des chiens qu’ils ont eus. « Le monde à venir » dévoile le journal intime d’une femme luttant contre le cancer sur une semaine, ponctuée par une visite médicale et une étrange rencontre avec un cinéaste qui lui fait une proposition troublante. « Parce qu’elle est là » est une courte nouvelle sur le frère du narrateur et ses voyages en mer. « Coda » est une mise en abyme où Raphaël Haroche se met en scène lors d’une visite dans un hôpital de jour, confronté à un groupe de lecteurs qui critiquent vertement ses nouvelles. Il se défend avec autodérision et aborde ses inspirations et son processus d’écriture.
Raphaël Haroche confirme ici sa double casquette d’auteur-compositeur et d’écrivain, poursuivant en parallèle sa carrière musicale – son album « Haute fidélité » est sorti la même année que ce recueil. Les thèmes qui traversent ses chansons se retrouvent dans sa prose : la fragilité des relations humaines, la mélancolie du temps qui passe, mais aussi des éclats de lumière dans les moments les plus sombres.
Ce qui saisit dans ces nouvelles, c’est leur capacité à transformer des instants apparemment anodins en points de rupture décisifs. Les personnages se débattent avec leurs démons intérieurs tandis que le monde continue sa course, indifférent à leurs tourments. Le titre prend alors tout son sens : chaque histoire constitue une éclipse momentanée, un voile qui s’interpose entre la lumière et l’obscurité.
Aux éditions FOLIO ; 224 pages.
