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Platon en 12 livres – Notre sélection

Platon naît à Athènes en 428/427 av. J.-C. dans une famille aristocratique. Son véritable nom est Aristoclès ; son surnom « Platon », qui signifie « large », lui vient probablement de sa carrure athlétique. Issu d’une lignée prestigieuse, il reçoit l’éducation traditionnelle des jeunes nobles athéniens, apprenant la gymnastique, la musique et les lettres.

À vingt ans, il rencontre Socrate qui devient son maître et change le cours de sa vie. Abandonnant ses ambitions politiques et ses aspirations poétiques, il se consacre à la philosophie. Pendant neuf ans, il suit l’enseignement de Socrate jusqu’à la condamnation à mort de celui-ci en 399 av. J.-C. Profondément marqué par cet événement, Platon quitte alors Athènes.

Il entreprend de longs voyages qui le mènent en Égypte, à Cyrène et en Grande-Grèce, où il s’initie aux doctrines pythagoriciennes. De retour à Athènes vers 387 av. J.-C., il fonde l’Académie, première institution d’enseignement supérieur du monde occidental, où il forme de nombreux disciples dont le plus célèbre est Aristote.

Par trois fois, Platon se rend en Sicile pour tenter de mettre en pratique ses théories politiques auprès du tyran Denys II, mais ces tentatives se soldent par des échecs. Il continue néanmoins d’enseigner et d’écrire à l’Académie jusqu’à sa mort en 348/347 av. J.-C., à l’âge de 80-81 ans. Son œuvre, composée essentiellement de dialogues philosophiques, influence profondément la pensée occidentale.

Voici notre sélection de ses livres majeurs.


1. Apologie de Socrate

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Résumé

En 399 avant J.-C., le philosophe Socrate comparaît devant le tribunal d’Athènes. Les accusations portées contre lui sont graves : corruption de la jeunesse et impiété envers les dieux de la cité. Face à ses accusateurs – Mélétos, Anytos et Lycon – Socrate refuse de se défendre par les artifices habituels de la rhétorique. Il choisit plutôt d’exposer sa conception de la sagesse et sa mission philosophique. Cette dernière lui aurait été confiée par l’oracle de Delphes, qui l’avait déclaré « le plus sage des hommes ». Pour comprendre cette énigme, Socrate avait interrogé politiciens, poètes et artisans, découvrant que sa sagesse résidait dans la conscience de sa propre ignorance. Malgré une défense éloquente et une argumentation rigoureuse, le tribunal le condamne à mort à une courte majorité. Socrate accepte sereinement son sort, refusant de s’évader ou de plaider pour une peine plus légère.

Autour du livre

L’Apologie se distingue des autres dialogues platoniciens par sa forme particulière : un long monologue entrecoupé d’échanges avec l’accusateur Mélétos. Ce texte constitue vraisemblablement l’une des premières œuvres de Platon, rédigée peu après la mort de son maître. Si la fidélité historique du discours reste débattue, l’œuvre transcende le simple compte-rendu judiciaire pour devenir un manifeste philosophique.

La portée universelle du texte réside dans l’opposition entre la conscience individuelle et l’autorité établie. Socrate incarne le penseur libre face à une société qui refuse la remise en question de ses certitudes. Son attitude devant la mort – calme et digne – influence profondément la tradition philosophique occidentale. Des penseurs comme Cicéron et Montaigne s’en inspireront pour leurs réflexions sur la mort.

L’impact du texte dépasse largement le cadre philosophique. Dès l’Antiquité, les premiers apologistes chrétiens établissent un parallèle entre Socrate et le Christ, tous deux condamnés pour avoir ébranlé les croyances de leur temps. Les artistes s’emparent également du sujet : de David à Canova, nombreux sont ceux qui représentent les derniers instants du philosophe. Au XXe siècle, Roberto Rossellini adapte l’œuvre au cinéma (1971).

Aux éditions LE LIVRE DE POCHE ; 89 pages.


2. Criton

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Résumé

Dans sa cellule athénienne, Socrate attend son exécution prochaine quand son ami Criton lui rend visite avant l’aube. Bouleversé par l’imminence de la mort du philosophe, Criton tente de le convaincre de s’évader grâce à un plan minutieusement préparé : les gardiens peuvent être soudoyés et un refuge l’attend en Thessalie. Pour persuader Socrate, Criton avance plusieurs arguments : sa mort serait une perte irréparable pour ses amis, elle ternirait leur réputation car on les accuserait de n’avoir pas voulu dépenser leur argent pour le sauver, et surtout elle priverait ses enfants de leur père et de leur éducation.

Face à ces arguments, Socrate oppose une réflexion philosophique sur la justice. Il rappelle que seule l’opinion des gens compétents compte, pas celle de la foule, et que l’essentiel n’est pas de vivre mais de bien vivre, c’est-à-dire justement. Pour démontrer l’injustice de l’évasion proposée, il fait parler les Lois d’Athènes dans une prosopopée célèbre : celles-ci lui rappellent qu’il a tacitement accepté leur autorité en choisissant de vivre dans la cité, qu’elles l’ont protégé et éduqué, et que les transgresser reviendrait à saper les fondements mêmes de la société.

Autour du livre

Ce dialogue soulève des questions fondamentales sur l’obéissance aux lois et la désobéissance civile qui résonnent encore aujourd’hui. Platon expose une des premières théories du contrat social : en restant volontairement dans une cité, le citoyen accepte implicitement de se soumettre à ses lois. La force de l’argumentation repose sur l’idée que la justice ne peut être atteinte en commettant soi-même une injustice.

Écrit peu après la mort de Socrate en 399 av. J.-C., ce dialogue témoigne de la volonté de Platon de justifier le choix de son maître face aux critiques. L’œuvre s’inscrit dans un moment crucial de l’histoire athénienne : après la défaite dans la guerre du Péloponnèse et le régime des Trente Tyrans, la démocratie restaurée reste fragile. Dans ce contexte, le respect des lois prend une importance particulière.

La portée philosophique du Criton dépasse largement son contexte historique. Le texte soulève des questions essentielles sur le rapport entre morale individuelle et obligations civiques, entre justice naturelle et justice légale. Ces interrogations ont nourri des siècles de réflexion politique, de Thomas d’Aquin aux philosophes des Lumières.

Aux éditions HATIER ; 96 pages.


3. Phédon

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Résumé

Dans ce dialogue philosophique majeur, Platon relate les derniers moments de Socrate, condamné à mort par les Athéniens en 399 av. J.-C. pour « impiété » et « corruption de la jeunesse ». Le récit est rapporté par Phédon d’Élis, disciple de Socrate, qui assiste à ses derniers instants dans sa cellule. Entouré de ses amis dont Simmias et Cébès, Socrate développe une longue réflexion sur l’immortalité de l’âme avant de boire la ciguë. Serein face à la mort qu’il considère comme une délivrance, le philosophe démontre par quatre arguments successifs que l’âme est immortelle : l’argument des contraires, la théorie de la réminiscence, l’argument de l’affinité entre l’âme et les Idées, et enfin l’argument de la participation de l’âme à l’Idée de vie.

Le dialogue s’achève sur la mort paisible de Socrate qui, après avoir bu le poison, s’éteint en demandant qu’on sacrifie un coq à Asclépios. Ses derniers mots énigmatiques ont suscité de nombreuses interprétations à travers les siècles.

Autour du livre

Ce texte fondateur de la philosophie occidentale marque une étape clé dans l’évolution de la pensée de Platon. Il y développe pour la première fois de manière systématique sa théorie des Idées, pilier de sa métaphysique. Le choix de mettre en scène la mort de son maître n’est pas anodin : en montrant Socrate affronter sereinement la mort grâce à la philosophie, Platon illustre la puissance de la raison face aux passions et aux craintes irrationnelles.

L’influence du Phédon sur la pensée occidentale a été considérable. Les Pères de l’Église y ont puisé des arguments pour défendre l’immortalité de l’âme. Au XVIIIe siècle, Moses Mendelssohn en propose une adaptation qui connaît un immense succès. Le tableau de Jacques-Louis David « La Mort de Socrate » (1787), directement inspiré du dialogue, cristallise l’image du philosophe acceptant sereinement son destin.

La portée universelle du texte tient aussi à sa dimension dramatique : la mise en scène du dernier jour d’un sage injustement condamné, capable de philosopher jusqu’au bout sans céder au désespoir, transcende le simple cadre philosophique pour atteindre une dimension profondément humaine.

Aux éditions FLAMMARION ; 448 pages.


4. La République

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Résumé

Dans La République, Socrate discute avec plusieurs interlocuteurs au Pirée, le port d’Athènes, lors d’une fête en l’honneur de la déesse Bendis. Ce qui commence comme une simple conversation sur la justice se transforme en une réflexion vertigineuse sur l’organisation idéale de la cité. Face aux arguments du sophiste Thrasymaque, qui définit la justice comme « l’intérêt du plus fort », Socrate entreprend de démontrer que la justice constitue un bien en soi. Pour mieux cerner sa nature, il propose d’observer comment elle se manifeste à l’échelle d’une cité entière avant de l’examiner dans l’âme individuelle.

Socrate élabore alors le modèle d’une cité parfaite, divisée en trois classes correspondant aux trois parties de l’âme : les philosophes-rois qui gouvernent (raison), les gardiens qui protègent (courage) et les producteurs qui pourvoient aux besoins matériels (désir). Dans cette cité idéale, les gardiens vivent en communauté, sans propriété privée ni famille traditionnelle. L’éducation y joue un rôle central, mêlant gymnastique pour le corps et musique pour l’âme. Les poètes y sont strictement contrôlés pour leurs effets potentiellement néfastes sur les esprits.

Autour du livre

Rédigée entre 380 et 370 av. J.-C., La République s’inscrit dans un contexte politique troublé, marqué par la défaite d’Athènes dans la guerre du Péloponnèse et l’expérience de la tyrannie des Trente. L’œuvre constitue la première théorie politique systématique de la tradition occidentale, établissant un lien indissoluble entre l’ordre de l’âme et celui de la cité. Les célèbres allégories de la caverne et du navire illustrent la nécessité d’un gouvernement éclairé par la philosophie.

Le dialogue a suscité des interprétations radicalement opposées au fil des siècles. Certains y voient les prémices d’un totalitarisme d’État, à l’instar de Karl Popper qui dénonce en 1945 le « programme politique » platonicien. D’autres, comme Hans-Georg Gadamer, considèrent plutôt l’utopie platonicienne comme un exercice de pensée destiné à éclairer la nature du politique. Le texte continue d’alimenter les débats sur les rapports entre philosophie et pouvoir.

Cette œuvre fondatrice a profondément influencé la philosophie politique ultérieure. Thomas More s’en inspire pour son Utopie, tandis que Rousseau y voit « le plus beau traité d’éducation qu’on ait jamais fait ». En 2001, elle est désignée comme le plus grand texte philosophique jamais écrit par un panel d’universitaires. Son influence s’étend jusqu’à la littérature moderne, notamment dans « Le Meilleur des mondes » d’Aldous Huxley ou « 1984 » de George Orwell. Mussolini lui-même y puise certaines de ses idées sur l’État idéal.

Aux éditions FLAMMARION ; 818 pages.


5. Le Banquet

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Résumé

En février 416 avant J.-C., dans sa demeure athénienne, le poète Agathon célèbre sa victoire aux Lénéennes par un banquet qui réunit l’élite intellectuelle de la cité. Les convives décident d’improviser des discours à la gloire d’Éros, divinité de l’amour jusque-là négligée par les orateurs et les poètes. Tour à tour, Phèdre, Pausanias, Eryximachos, Aristophane et Agathon livrent leur vision de l’amour. Le point culminant survient lorsque Socrate prend la parole et révèle l’enseignement qu’il a reçu de Diotima, une prêtresse de Mantinée, sur la véritable nature d’Éros. La soirée se termine dans le tumulte avec l’arrivée d’Alcibiade qui, ivre, fait irruption et prononce un éloge enflammé de Socrate.

L’histoire nous parvient par le récit d’Apollodore qui, quinze ans après les faits, rapporte ce qu’il a appris d’Aristodème, témoin direct de l’événement. Cette mise en abyme souligne d’emblée l’importance exceptionnelle de cette soirée, devenue légendaire dans l’Athènes de l’époque. Les interventions des différents orateurs dessinent une progression qui mène des conceptions conventionnelles de l’amour jusqu’à la révélation socratique d’un Éros philosophique, guide vers la contemplation du Beau absolu.

Autour du livre

Rédigé entre 385 et 378 avant J.-C., Le Banquet se distingue des autres dialogues platoniciens par sa structure dramatique élaborée. En faisant dialoguer des personnages historiques majeurs comme Socrate, Aristophane ou Alcibiade, Platon confronte différentes conceptions de l’amour qui circulaient dans l’Athènes classique. Le mythe des êtres doubles d’Aristophane et la théorie de l’ascension érotique de Diotima comptent parmi les passages les plus célèbres de la littérature philosophique antique.

Cette œuvre inaugure une tradition littéraire particulière, celle du « banquet philosophique », qui connaîtra une longue postérité. Le texte a suscité d’innombrables commentaires et inspiré des créateurs dans tous les domaines artistiques, de la Renaissance italienne à nos jours. Marsile Ficin y puisa sa théorie de l’amour platonique, tandis que des peintres comme Anselm Feuerbach immortalisaient la scène de l’arrivée d’Alcibiade.

Les implications philosophiques du texte dépassent largement la simple théorie de l’amour. En présentant Éros comme un intermédiaire entre le sensible et l’intelligible, Platon établit un lien fondamental entre désir et connaissance. Cette conception novatrice influencera durablement la pensée occidentale, des néoplatoniciens aux psychanalystes modernes.

Aux éditions FLAMMARION ; 288 pages.


6. Phèdre

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Résumé

Dans les rues d’Athènes, Socrate rencontre par hasard le jeune Phèdre qui vient d’assister à un discours du rhéteur Lysias sur l’amour. Les deux hommes quittent la ville et s’installent au bord de l’Ilissos, sous un platane, pour en discuter. Phèdre lit alors le texte de Lysias qui soutient qu’il vaut mieux accorder ses faveurs à celui qui n’aime pas plutôt qu’à l’amoureux passionné. Socrate prononce à son tour un premier discours dans la même veine, avant de se rétracter : inspiré par son démon familier, il fait l’éloge de la folie amoureuse d’origine divine à travers le célèbre mythe du char ailé, où l’âme est comparée à un attelage conduit par un cocher et tiré par deux chevaux, l’un docile et l’autre rétif.

La discussion s’oriente ensuite vers la rhétorique et l’art du discours. Socrate démontre que la véritable éloquence doit reposer sur la connaissance philosophique et la dialectique. Le dialogue s’achève sur une critique de l’écriture, illustrée par le mythe de Theuth : les textes écrits ne peuvent se défendre seuls et risquent d’affaiblir la mémoire, tandis que l’enseignement oral permet un véritable échange.

Autour du livre

Ce dialogue de la maturité de Platon, rédigé vers 370 av. J.-C., marque un tournant majeur dans sa pensée. Sa réflexion sur l’amour comme élan vers le divin annonce les développements du Banquet, tandis que sa critique de l’écriture éclaire d’un jour nouveau sa propre pratique d’écrivain philosophe. La mise en scène bucolique au bord du fleuve contraste avec l’urbanité habituelle des dialogues platoniciens.

L’influence du Phèdre traverse toute l’histoire de la philosophie occidentale. Le mythe de l’attelage ailé, repris notamment par Freud, demeure une puissante métaphore de la psyché humaine. La réflexion sur les rapports entre oral et écrit trouve un écho particulier chez Derrida dans « La Pharmacie de Platon ». Emmanuel Lévinas y puise sa conception de l’éros comme ouverture à l’altérité.

La modernité du Phèdre tient aussi à son questionnement sur la transmission du savoir et le rôle des médias. Sa défense d’une communication vivante face aux dangers de la trace écrite résonne étrangement à l’heure du numérique. Le dialogue unit de façon magistrale la profondeur métaphysique et la grâce littéraire, faisant de cette méditation sur l’amour et la beauté l’un des sommets de l’œuvre platonicienne.

Aux éditions FLAMMARION ; 304 pages.


7. Théétète

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Résumé

Dans ce dialogue philosophique majeur rédigé vers 360 av. J.-C., Platon met en scène une conversation entre Socrate et le jeune mathématicien Théétète, dont le compte-rendu est lu à voix haute par un esclave à Mégare. L’action principale se déroule à Athènes, dans une palestre, quelques jours avant le procès qui conduira à la condamnation à mort de Socrate. Le philosophe interroge Théétète sur la nature du savoir et de la connaissance, l’amenant progressivement à formuler trois définitions successives : le savoir serait d’abord la sensation, puis l’opinion vraie, et enfin l’opinion vraie accompagnée d’une explication rationnelle. À travers sa méthode maïeutique consistant à « accoucher les esprits », Socrate réfute méthodiquement chacune de ces propositions, laissant la question irrésolue.

La discussion s’articule autour d’un examen critique des thèses du sophiste Protagoras, pour qui « l’homme est la mesure de toute chose », et d’Héraclite sur le flux perpétuel de la réalité. Une digression centrale oppose la figure du philosophe, tourné vers la contemplation des vérités éternelles, à celle du rhéteur préoccupé par les affaires terrestres – opposition illustrée par l’anecdote de Thalès tombant dans un puits en observant les astres.

Autour du livre

Le Théétète occupe une place singulière dans l’œuvre platonicienne. Premier volet d’une trilogie comprenant aussi le Sophiste et le Politique, ce texte marque une transition entre la période de maturité et les derniers écrits. Son originalité tient à l’absence remarquée de la théorie des Idées, pourtant centrale dans la pensée de Platon. Cette omission a suscité d’intenses débats interprétatifs : certains y voient une remise en cause par Platon de sa propre doctrine, d’autres considèrent qu’il cherche précisément à démontrer la nécessité des Idées pour fonder une théorie de la connaissance.

L’influence du dialogue s’est exercée bien au-delà de l’Antiquité. Wittgenstein y trouve matière à réflexion sur la nature du langage, tandis que les analyses du relativisme et de l’erreur nourrissent encore les discussions épistémologiques contemporaines. La définition du savoir comme « opinion vraie justifiée » inspire notamment à Edmund Gettier ses célèbres objections dans les années 1960.

Aux éditions FLAMMARION ; 412 pages.


8. Le Sophiste

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Résumé

Dans ce dialogue philosophique rédigé vers 360 av. J.-C., Platon met en scène une conversation entre un étranger venu d’Élée et le jeune mathématicien Théétète, en présence de Socrate et du mathématicien Théodore. L’enjeu est de définir précisément ce qu’est un sophiste, ces professeurs itinérants qui enseignent l’art de la persuasion moyennant rémunération. L’étranger propose d’abord d’exercer la méthode de définition sur un exemple simple : l’art du pêcheur à la ligne. Par divisions successives des différentes catégories d’activités, il parvient à une définition exacte.

Cette même méthode appliquée au sophiste aboutit à plusieurs définitions possibles : chasseur intéressé de jeunes gens riches, marchand de connaissances, athlète dans les joutes oratoires… Pour établir la définition la plus juste, l’étranger doit d’abord résoudre une difficulté philosophique majeure : comment le sophiste peut-il produire des discours faux, alors que selon Parménide, le non-être n’existe pas ? Cette question conduit à une analyse des relations entre l’être et le non-être.

L’étranger démontre que le non-être existe d’une certaine manière, en tant qu’il exprime une différence par rapport à l’être. Cette démonstration permet finalement de définir le sophiste comme un imitateur qui produit des simulacres trompeurs, par opposition au philosophe qui recherche la vérité.

Autour du livre

Ce dialogue marque un tournant décisif dans l’histoire de la philosophie occidentale. Pour la première fois, la question « Qu’est-ce que l’être ? » fait l’objet d’une investigation systématique. En critiquant la doctrine de Parménide sur l’impossibilité du non-être, Platon élabore une ontologie plus nuancée qui admet différents degrés de réalité. Sa théorie des « genres suprêmes » (l’être, le mouvement, le repos, le même et l’autre) pose les bases de la future théorie des catégories.

L’influence du Sophiste sur la pensée ultérieure est considérable. Les néoplatoniciens y puisent leur conception des relations entre l’Un et l’Être. Hegel y voit une préfiguration de sa dialectique. Au XXe siècle, Heidegger lui consacre un important cours et les philosophes analytiques s’intéressent à ses analyses du langage et de la prédication. La définition platonicienne du sophiste comme producteur de simulacres inspire également les réflexions contemporaines sur l’image et la représentation.

Aux éditions FLAMMARION ; 324 pages.


9. Parménide

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Résumé

Dans ce dialogue philosophique majeur, Platon met en scène une rencontre entre Parménide, philosophe d’Élée alors âgé de 65 ans, son disciple Zénon, et un jeune Socrate de 19 ans. L’action se déroule à Athènes vers 450 av. J.-C., lors des Grandes Panathénées. Le récit nous parvient à travers plusieurs intermédiaires : Céphale de Clazomènes rapporte ce qu’Antiphon lui a raconté, qui lui-même tenait l’histoire de Pythodore, témoin direct de l’échange. La discussion s’amorce autour d’un texte de Zénon défendant la thèse de Parménide sur l’unicité de l’être. Socrate objecte en invoquant sa théorie des Formes intelligibles, mais se heurte aux réfutations méthodiques de Parménide.

Dans la seconde partie du dialogue, Parménide guide le jeune Aristote (homonyme du célèbre philosophe) à travers une série d’exercices dialectiques complexes. Ces démonstrations examinent les conséquences logiques de deux hypothèses fondamentales : « l’Un est » et « l’Un n’est pas ». Huit analyses successives révèlent les contradictions inhérentes à chaque position, aboutissant à une conclusion paradoxale : que l’Un soit ou ne soit pas, il semble impossible d’éviter les contradictions logiques.

Autour du livre

Le Parménide constitue un tournant décisif dans l’évolution de la pensée platonicienne. Rédigé entre 375 et 360 av. J.-C., il marque une remise en question profonde de la théorie des Formes développée dans les dialogues précédents. Les arguments déployés contre cette théorie, notamment le célèbre « argument du troisième homme », ont durablement marqué l’histoire de la métaphysique occidentale.

Ce dialogue suscite depuis l’Antiquité des interprétations divergentes. Les néoplatoniciens y ont vu l’expression d’une théologie négative, tandis que d’autres lecteurs l’interprètent comme un exercice de logique pure. Hegel le considère comme « le plus grand chef-d’œuvre de la dialectique antique », saluant sa capacité à démontrer les limites de la pensée rationnelle.

La postérité du Parménide s’avère considérable. Son influence s’étend bien au-delà du néoplatonisme, nourrissant les réflexions de penseurs aussi différents que Nicolas de Cues, Marsile Ficin ou Leibniz. Les débats qu’il soulève sur la nature de l’Un, le rapport entre unité et multiplicité, ou les paradoxes de la prédication continuent d’alimenter les discussions philosophiques contemporaines.

Aux éditions FLAMMARION ; 384 pages.


10. Timée

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Résumé

Dans ce dialogue philosophique rédigé vers 358 av. J.-C., Platon met en scène une conversation entre Socrate et trois interlocuteurs : Critias, Hermocrate et surtout Timée de Locres, savant pythagoricien probablement fictif. L’entretien se déroule pendant les Panathénées, grande fête religieuse d’Athènes. Après avoir résumé les caractéristiques de la cité idéale évoquée la veille, Socrate demande à ses amis de montrer comment cette cité pourrait exister concrètement. Critias commence par évoquer l’antique guerre entre Athènes et l’Atlantide. Puis Timée, expert en astronomie, prend la parole pour exposer sa vision de la naissance de l’univers et de la nature humaine. Il décrit comment le Démiurge, figure divine centrale, façonne le monde en s’inspirant d’un modèle idéal et parfait.

Le récit de Timée détaille la création de l’Âme du monde selon des proportions mathématiques et musicales précises. Il explique ensuite la formation des quatre éléments (feu, air, eau, terre) à partir de figures géométriques fondamentales. Cette cosmogonie s’accompagne d’une description approfondie de l’anatomie et de la physiologie humaines, établissant des correspondances entre le macrocosme (l’univers) et le microcosme (l’homme).

Le dialogue se termine sur l’étude des maladies de l’âme et du corps, ainsi que sur les moyens d’atteindre l’harmonie par l’imitation des mouvements parfaits de l’univers. Le troisième dialogue initialement prévu, l’Hermocrate, n’a jamais été écrit.

Autour du livre

Premier traité complet de cosmologie parvenu jusqu’à nous, le Timée révolutionne la pensée antique en concevant la création du monde comme un acte libre de générosité divine, guidé par l’intelligence et les mathématiques. Cette vision novatrice influence profondément la science et la philosophie occidentales, de l’Antiquité à la Renaissance. Les Pères de l’Église y voient des similitudes avec la Genèse biblique, tandis que les savants médiévaux s’appuient sur sa conception mathématique de l’univers.

Au XXe siècle, des physiciens comme Heisenberg ou Weyl soulignent la modernité des intuitions platoniciennes sur la structure mathématique de la matière. La notion énigmatique de « khôra », ce réceptacle spatial où se déploie le monde sensible, continue d’interroger les philosophes contemporains comme Jacques Derrida. La profondeur métaphysique du texte et sa rigueur mathématique en font, selon le mathématicien Whitehead, l’un des deux plus importants traités cosmologiques avec les Principia de Newton.

Aux éditions FLAMMARION ; 496 pages.


11. Les Lois

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Résumé

Dans Les Lois, son dernier et plus long dialogue, Platon met en scène trois vieillards qui cheminent vers la grotte de Zeus en Crète : un Athénien anonyme, le Spartiate Mégillos et le Crétois Kleinias. Leur conversation porte sur la meilleure façon d’administrer une cité et de conduire sa vie. Kleinias révèle qu’il fait partie d’une commission chargée de créer une nouvelle colonie. Les trois hommes entreprennent alors d’élaborer une constitution idéale pour cette future cité, qui sera nommée Magnésie. L’Athénien, figure centrale du dialogue, expose sa vision d’un État fondé sur la vertu et régulé par des lois sages.

Le projet politique qui émerge de leurs échanges prévoit une population fixe de 5040 foyers, avec une répartition égalitaire des terres. Les citoyens doivent se consacrer à l’agriculture, le commerce étant réservé aux étrangers. Un système complexe de magistratures est établi, incluant notamment un Conseil nocturne chargé de préserver l’intégrité des lois. L’éducation occupe une place centrale, visant à former des citoyens vertueux à travers la musique, la gymnastique et l’étude des sciences.

Autour du livre

Rédigé dans les dernières années de sa vie, ce dialogue témoigne d’une évolution significative dans la pensée de Platon. Contrairement à La République qui proposait une cité idéale dirigée par des philosophes-rois, Les Lois présente un modèle plus pragmatique où la stabilité sociale repose sur un équilibre entre autorité et liberté. Cette « seconde navigation » politique n’est pas tant une renonciation qu’une adaptation aux contraintes de la réalité humaine.

Le texte se distingue par son approche novatrice de la législation. Chaque loi doit être précédée d’un préambule explicatif visant à convaincre les citoyens de son bien-fondé. Cette méthode, qui combine persuasion et contrainte, illustre la volonté de créer un ordre social fondé sur la raison plutôt que sur la seule coercition.

L’influence des Lois s’est avérée considérable à travers les siècles. Le texte a nourri les réflexions de penseurs comme Cicéron et Montesquieu sur l’art de légiférer. Sa conception d’une constitution mixte, conjuguant éléments démocratiques et aristocratiques, préfigure certains aspects des systèmes politiques modernes.

Aux éditions FLAMMARION ; 466 pages.


12. Gorgias

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Résumé

Le Gorgias met en scène un dialogue entre Socrate et trois interlocuteurs successifs dans la demeure athénienne de Calliclès, où le célèbre rhéteur Gorgias vient de donner une leçon. Socrate, accompagné de son disciple Chéréphon, interroge d’abord Gorgias sur la nature et la finalité de la rhétorique. Face aux réponses évasives du maître, son jeune disciple Polos prend le relais mais se trouve à son tour mis en difficulté par la dialectique socratique qui démontre que la rhétorique n’est qu’une forme de flatterie, incapable de mener au vrai et au juste. C’est alors que Calliclès, notable athénien et admirateur de Gorgias, s’engage dans un débat plus fondamental avec Socrate sur la justice, le pouvoir et le bonheur.

L’affrontement entre Socrate et Calliclès constitue le cœur philosophique du dialogue. Pour Calliclès, la justice conventionnelle n’est qu’une invention des faibles pour brider les forts, et le bonheur réside dans la satisfaction illimitée des désirs. Socrate réfute méthodiquement cette vision en démontrant qu’il est pire de commettre l’injustice que de la subir, et que le véritable pouvoir politique devrait viser à rendre les citoyens meilleurs plutôt qu’à les flatter. Le dialogue s’achève sur un mythe eschatologique où les âmes sont jugées nues après la mort, sans les artifices de la rhétorique.

Autour du livre

Rédigé vers 390 av. J.-C., le Gorgias s’inscrit dans le contexte des vifs débats qui agitent Athènes après la condamnation de Socrate. La critique radicale de la rhétorique et des grands hommes politiques athéniens témoigne de la rupture de Platon avec les institutions démocratiques de sa cité. Le philosophe y développe pour la première fois sa conception de la justice comme ordre de l’âme, préfigurant les thèses de La République.

Les dialogues serrés et la progression dramatique font du Gorgias l’un des textes les plus percutants de Platon. La figure de Calliclès, peut-être fictive mais remarquablement campée, incarne avec force la tentation du relativisme moral et de la loi du plus fort. Ses arguments, repris par Nietzsche, continuent de résonner dans les débats contemporains sur le pouvoir et la justice.

L’influence du Gorgias traverse toute l’histoire de la philosophie. Déjà dans l’Antiquité, le dialogue suscite de vives réactions, notamment chez les rhéteurs comme Aelius Aristide qui tentent de défendre leur art contre les attaques platoniciennes. La pertinence de sa réflexion sur les rapports entre morale et politique lui vaut d’être particulièrement étudié dans les écoles néoplatoniciennes. Hannah Arendt y puise sa réflexion sur le dialogue intérieur de la conscience comme fondement de l’éthique.

Aux éditions FLAMMARION ; 320 pages.

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