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Joanne Harris en 2 romans – Notre sélection

Joanne Harris en 2 romans – Notre sélection

Née le 3 juillet 1964 à Barnsley dans le Yorkshire, Joanne Michèle Sylvie Harris grandit au-dessus de la confiserie de ses grands-parents. Fille d’un père anglais et d’une mère française, elle parle uniquement le français jusqu’à son entrée à l’école. Son enfance est marquée par les mythologies nordiques et les récits d’aventures.

Après des études de langues modernes et médiévales au St Catharine’s College de Cambridge, elle devient brièvement comptable avant de se tourner vers l’enseignement. Pendant quinze ans, elle enseigne les langues modernes tout en commençant à écrire.

Sa carrière littéraire décolle véritablement avec « Chocolat » (1999), roman qui connaît un immense succès et est adapté au cinéma avec Juliette Binoche et Johnny Depp. Elle développe depuis une œuvre variée, touchant aussi bien le thriller psychologique que la fantasy inspirée des mythologies nordiques. Ses thèmes de prédilection incluent la nourriture comme révélateur des personnages, la maternité, la religion, la magie du quotidien.

Active dans le milieu littéraire britannique, elle préside la Society of Authors et s’engage dans diverses causes, notamment pour la juste rémunération des auteurs et contre le sexisme dans l’édition. Son travail est récompensé par de nombreuses distinctions, dont un OBE (Officer of the Order of the British Empire) en 2022. Elle vit actuellement dans le Yorkshire avec son mari Kevin et écrit depuis son cabanon de jardin.

Voici notre sélection de ses romans majeurs.


1. Chocolat (1999)

Disponible sur Amazon Disponible à la Fnac

Résumé

Dans un petit village français des années 1950, Lansquenet-sous-Tannes, l’arrivée de Vianne Rocher et de sa fille Anouk bouleverse la quiétude des habitants. Cette mère célibataire décide, en pleine période de Carême, d’ouvrir une chocolaterie baptisée « La Céleste Praline » juste en face de l’église. Son installation suscite immédiatement l’hostilité du père Francis Reynaud, curé de la paroisse, qui perçoit cette boutique comme une provocation et une menace pour l’ordre moral qu’il s’efforce de maintenir.

Peu à peu, la magie du chocolat opère sur les villageois. Vianne possède un don particulier : elle devine les péchés mignons de chacun et prépare des confiseries sur mesure. Sa générosité et son absence de préjugés attirent une clientèle éclectique : Armande, une vieille dame diabétique en conflit avec sa fille, Joséphine qui fuit un mari violent, ou encore Guillaume, un homme solitaire attaché à son chien malade. L’arrivée de gitans accentue les tensions avec le père Reynaud, qui voit d’un très mauvais œil ces nouveaux « marginaux ».

Le père Reynaud, persuadé que Vianne incarne une force maléfique, tente par tous les moyens de la faire partir. Le conflit atteint son paroxysme lorsque celle-ci annonce l’organisation d’un « Festival du Chocolat » le dimanche de Pâques, jour saint par excellence.

Autour du livre

À travers le prisme du chocolat, Joanne Harris tisse une allégorie sur les antagonismes qui fracturent une petite communauté rurale française des années 1950. Le nom même du village, Lansquenet-sous-Tannes, recèle une ambiguïté significative : « lansquenet » désigne un jeu de cartes tandis que « sous Tannes » évoque phonétiquement la soutane, symbole de l’emprise religieuse qui étouffe la vie locale.

« Chocolat » met en scène une critique sociale acérée des mécanismes de contrôle et d’exclusion. La boutique de Vianne, « La Céleste Praline », devient le point focal d’une rébellion douce contre l’ordre établi. Les villageois, d’abord méfiants, se métamorphosent au contact des douceurs sucrées qui agissent comme des catalyseurs de changement social. Le choix de situer une chocolaterie face à l’église, en période de Carême, constitue une provocation qui transcende la simple opposition entre péché et vertu.

Les personnages secondaires incarnent les différentes facettes de l’intolérance : Caroline Clairmont qui prive sa mère du contact avec son petit-fils, Paul-Marie Muscat qui maltraite son épouse Joséphine, les villageois qui rejettent les gitans. Face à ces figures d’oppression, Vianne et sa fille Anouk représentent une force de libération, héritière d’une lignée de femmes indépendantes – la bisaïeule de Harris ayant inspiré les caractères de Vianne et d’Armande.

Le succès considérable du livre (plus d’un million d’exemplaires vendus au Royaume-Uni) s’est concrétisé par plusieurs distinctions : le Creative Freedom Award en 2000, les Whittaker Gold and Platinum Awards en 2001 et 2012, une nomination au Whitbread Prize. L’adaptation cinématographique de Lasse Hallström en 2000, avec Juliette Binoche et Johnny Depp, a récolté huit nominations aux BAFTA et cinq aux Oscars. L’engouement du public a conduit Harris à poursuivre la saga avec trois suites : « The Lollipop Shoes » (2007), « Des pêches pour Monsieur le curé » (2012) et « The Strawberry Thief » (2019).

La critique littéraire a salué cette œuvre singulière : Sophia Watson, dans le Literary Review, l’a qualifiée « d’excellent livre », tandis que Charles de Lint a loué la prose de Harris en comparant « Chocolat » à « Like Water for Chocolate », tout en soulignant sa spécificité européenne. The Guardian l’a classé en 2012 à la 61e position de sa liste des « 100 bestselling books of all time ».

Aux éditions FOLIO ; 416 pages.


2. Les cinq quartiers de l’orange (2001)

Disponible sur Amazon Disponible à la Fnac

Résumé

Dans la France des années 1990, Framboise Simon retourne incognito dans son village natal des Laveuses, sur les bords de la Loire. Âgée de soixante-cinq ans, elle rachète la ferme familiale et y ouvre une crêperie où elle cuisine les recettes héritées de sa mère. Son seul patrimoine : un carnet de cuisine annoté de mystérieuses notes codées. Mais sous ce nom d’emprunt se cache en réalité Framboise Dartigen, dont la famille fut chassée du village cinquante ans plus tôt dans la honte et le scandale.

L’histoire nous ramène alors en 1942, alors que Framboise n’a que neuf ans. Après la mort de son père au front, elle vit avec son frère Cassis, sa sœur Reine-Claude et leur mère Mirabelle, une veuve austère sujette à de violentes migraines déclenchées par l’odeur des oranges. Les trois enfants, livrés à eux-mêmes, nouent une relation ambiguë avec un jeune soldat allemand, Tomas Leibniz. En échange de quelques friandises et d’une canne à pêche, ils lui livrent des informations sur les habitants du village. Ce jeu d’apparence innocent conduira à la mort de onze villageois et précipitera leur fuite des Laveuses.

Autour du livre

Shortlisté pour le WH Smith Literary Award en 2002, ce cinquième roman de Joanne Harris puise dans ses racines franco-britanniques pour broder une intrigue où la petite histoire rejoint la grande. Les critiques soulignent particulièrement la construction en miroir entre passé et présent, qui permet d’éclairer progressivement les zones d’ombre du récit. La romancière a d’ailleurs publié un livre de recettes complémentaire, « Le Petit Larousse des recettes de famille », qui prolonge l’univers culinaire du roman.

La symbolique culinaire qui irrigue le récit dépasse la simple évocation gastronomique : chaque recette du carnet maternel devient un code secret, une clé pour décrypter les non-dits familiaux. Entre les taches de sauce et les annotations mystérieuses se dessine le portrait d’une mère qui ne sait exprimer son amour qu’à travers ses fourneaux. Cette dualité entre rudesse apparente et tendresse dissimulée constitue l’un des fils conducteurs de l’œuvre.

La Loire s’impose comme une présence majeure, à la fois complice des jeux d’enfants et gardienne des secrets les plus sombres. Cette ambiance de bord de fleuve, avec ses berges vaseuses et ses broussailles complices, sert d’écrin à une réflexion sur l’innocence perdue. L’onomastique fruitière des personnages (Cassis, Reine-Claude, Framboise, Mirabelle) crée un contraste saisissant avec la gravité des événements relatés.

Le roman aborde la période de l’Occupation sous un angle peu conventionnel : celui de l’insouciance enfantine confrontée aux compromissions morales. Les trois enfants Dartigen se trouvent pris dans un engrenage où la naïveté le dispute à la perversité, où les jeux d’enfants basculent imperceptiblement dans la tragédie. Cette transmission intergénérationnelle de la culpabilité, des non-dits et des blessures mal cicatrisées constitue la colonne vertébrale du récit.

Aux éditions FOLIO ; 432 pages.

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