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Annie Ernaux en 10 romans autobiographiques – Notre sélection

Annie Ernaux, née Annie Duchesne le 1er septembre 1940 à Lillebonne en Normandie, est une écrivaine française majeure, lauréate du prix Nobel de littérature en 2022. Issue d’un milieu modeste, elle passe son enfance à Yvetot où ses parents tiennent un café-épicerie.

Après des études de lettres aux universités de Rouen puis de Bordeaux, elle devient professeure de lettres, un métier qu’elle exercera jusqu’à sa retraite en 2000. Elle publie son premier roman autobiographique, « Les armoires vides », en 1974. En 1984, elle obtient le prix Renaudot pour « La place ».

Son œuvre, largement autobiographique, évoque les thèmes de l’ascension sociale, des rapports de classe, de la condition féminine ou encore de la mémoire collective. Elle développe une écriture qu’elle qualifie de « plate », dépouillée, au service d’une démarche qu’elle nomme « auto-socio-biographique », fortement influencée par la sociologie.

Parmi ses œuvres majeures figurent « Une femme » (1988), « Passion simple » (1992), « La honte » (1997), « Les années » (2008), et plus récemment « Le jeune homme » (2022). Militante engagée à gauche, elle prend régulièrement position sur des questions sociales et politiques.

En 2022, elle reçoit le prix Nobel de littérature pour « le courage et l’acuité clinique avec laquelle elle découvre les racines, les éloignements et les contraintes collectives de la mémoire personnelle ».

Annie Ernaux vit à Cergy depuis 1975. Son œuvre est traduite dans une cinquantaine de langues et a fait l’objet de nombreuses adaptations au cinéma et au théâtre.

Voici notre sélection de ses romans majeurs.


1. L’événement (2000)

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Nous sommes à Rouen en 1963. Annie Ernaux, étudiante brillante issue d’un milieu ouvrier, découvre avec effroi qu’elle est enceinte suite à une brève liaison estivale. Pour cette jeune femme de 23 ans qui rêve d’émancipation par les études, pas question de renoncer à ses ambitions : elle doit avorter. Mais dans la France gaulliste d’avant la loi Veil, interrompre une grossesse est un délit passible de prison.

Commence alors une course contre la montre angoissante. Les médecins consultés refusent de l’aider, par peur des sanctions. Le géniteur se montre totalement indifférent. Ses amis évitent le sujet ou la jugent. Elle finit par obtenir l’adresse d’une « faiseuse d’anges » à Paris, qui pratique des avortements clandestins moyennant 400 francs. L’intervention se déroule dans des conditions sanitaires précaires et entraîne de graves complications : hémorragie, hospitalisation d’urgence, où elle subit l’hostilité du personnel soignant qui la traite comme une criminelle.

Trente-cinq ans plus tard, Annie Ernaux décide de raconter cet épisode traumatisant de sa jeunesse. À partir des notes de son journal intime, elle reconstitue pas à pas son parcours du combattant, dans une société où la maternité hors mariage était un déshonneur, l’avortement un tabou absolu. Au-delà du témoignage, Annie Ernaux dresse un réquisitoire contre l’hypocrisie sociale et les préjugés de classe qui condamnaient les femmes à la clandestinité.

Adapté au cinéma en 2021 par Audrey Diwan – qui remportera le Lion d’or à Venise – « L’événement » n’a rien perdu de son actualité brûlante. Il résonne particulièrement aujourd’hui, alors que le droit à l’avortement est remis en cause dans plusieurs pays. Le livre figure parmi les œuvres majeures qui ont valu à Annie Ernaux le prix Nobel de littérature en 2022.

Aux éditions FOLIO ; 130 pages.


2. Les années (2008)

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Dans « Les années », Annie Ernaux retrace six décennies d’histoire française, de l’après-guerre aux années 2000, à travers le prisme d’une vie – la sienne. L’ouvrage s’ouvre sur une première photo en noir et blanc d’une petite fille sur une plage de galets en 1949. Cette image inaugure une série de douze clichés qui jalonnent le récit, servant de points d’ancrage à la mémoire et au temps qui passe.

Le récit suit la trajectoire d’une femme née en 1940 dans un milieu modeste de Normandie, qui deviendra professeure de lettres. Les photographies la montrent tour à tour enfant, adolescente, jeune mariée, mère, puis grand-mère. Mais plutôt que d’utiliser le « je » traditionnel de l’autobiographie, Ernaux opte pour une narration à la troisième personne (« elle ») et emploie souvent le « on » ou le « nous » collectif. Cette distance lui permet d’entrelacer son histoire personnelle avec celle de toute une génération.

Le fil chronologique déroule les mutations de la société française : l’arrivée de la télévision et des supermarchés, mai 68, la libération sexuelle, l’émancipation des femmes, jusqu’à l’avènement d’Internet. Les repas de famille servent de moments privilégiés pour observer l’évolution des mentalités à travers les conversations qui s’y tiennent, des souvenirs de guerre aux débats politiques contemporains.

Paru en 2008, « Les années » marque l’aboutissement d’un projet porté pendant plus de vingt ans. Le livre a reçu plusieurs distinctions majeures dont le prix Marguerite Duras et le prix François-Mauriac. Son originalité tient à cette forme nouvelle d’ « autobiographie impersonnelle » qui transforme une existence singulière en fresque sociale. Les dernières pages révèlent la genèse de l’œuvre, née du désir de « sauver quelque chose du temps où l’on ne sera plus jamais ».

Aux éditions FOLIO ; 256 pages.


3. La femme gelée (1981)

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Dans la France des années 1950-1960, une jeune femme grandit au sein d’une famille atypique : sa mère dirige une épicerie pendant que son père s’occupe de la cuisine et du ménage. Cette configuration inhabituelle forge sa vision du monde et des rapports hommes-femmes. Ses parents l’encouragent à étudier, à lire, à s’émanciper, loin des stéréotypes de l’époque qui cantonnent les filles aux tâches domestiques.

L’adolescence vient pourtant bouleverser ses certitudes. À travers ses amies et leurs familles « normales », elle découvre ce que la société attend d’une femme : être douce, soumise, préoccupée par son apparence. Malgré sa résistance initiale, elle se plie peu à peu à ces codes pour plaire aux garçons. Les années d’études supérieures lui offrent une parenthèse de liberté, avant qu’elle ne rencontre celui qui deviendra son mari – un étudiant aux idées progressistes qui partage apparemment sa vision égalitaire du couple.

Le mariage, puis la maternité, révèlent une toute autre réalité. Son époux, maintenant cadre, attend d’elle qu’elle assume seule la charge du foyer et des enfants. Ses ambitions professionnelles passent au second plan. Malgré l’obtention de son CAPES et un poste d’enseignante, elle se sent piégée dans une vie qui l’étouffe. Elle est cette « femme gelée » qui donne son titre au livre.

Publié en 1981, ce troisième roman d’Annie Ernaux fut d’abord mal accueilli dans une France qui se pensait débarrassée des inégalités hommes-femmes. Quarante ans plus tard, sa description clinique de l’aliénation domestique résonne encore. Sans jamais sombrer dans le pamphlet rageur, le texte dissèque les mécanismes insidieux qui peuvent conduire une femme éduquée, issue d’un milieu progressiste, à reproduire malgré elle les schémas qu’elle rejetait. Le livre, adapté au théâtre en 2002, continue d’interpeller par sa lucidité dérangeante sur la condition féminine.

Aux éditions FOLIO ; 181 pages.


4. La place (1983)

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À la mort de son père en 1967, Annie Ernaux entreprend de retracer son parcours, celui d’un homme né au début du XXe siècle dans une famille de paysans normands. D’abord garçon de ferme puis ouvrier, il finit par acquérir avec son épouse un modeste café-épicerie à Yvetot, en Normandie. Cette ascension sociale, aussi minime soit-elle, représente pour lui l’accomplissement d’une vie. Mais elle ne suffit pas à combler le fossé qui se creuse peu à peu avec sa fille unique, promise par ses études à un destin bourgeois.

Le récit navigue entre deux temporalités : celle de l’enfance d’Annie Ernaux, bercée par les conversations des clients du café et les préoccupations quotidiennes de ses parents, et celle de l’âge adulte où, devenue professeure agrégée, elle mesure la distance qui la sépare désormais de son milieu d’origine. À travers des scènes du quotidien – les repas dominicaux, les vacances modestes, les inquiétudes face à l’argent – se dessine le portrait d’un homme simple et digne, attaché à sa « place » dans la société.

Publié en 1983, ce texte autobiographique marque un tournant dans la carrière d’Annie Ernaux. Le prix Renaudot qu’elle reçoit l’année suivante consacre une œuvre qui refuse tout artifice littéraire pour mieux dire la vérité sociale. En choisissant ce qu’elle nomme une « écriture plate », dépouillée de tout lyrisme, elle invente une forme nouvelle d’autobiographie qui conjugue l’intime et le collectif. Les expressions en italique, directement tirées du parler populaire de son père, agissent comme autant de marqueurs d’une époque et d’une classe sociale. Cette démarche influencera toute une génération d’écrivains, d’Édouard Louis à Didier Eribon.

Aux éditions FOLIO ; 113 pages.


5. Une femme (1988)

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Un lundi d’avril 1986, Annie Ernaux perd sa mère, « la seule femme qui ait compté » selon ses mots. Trois semaines après les funérailles, elle commence à écrire sur celle qui vient de disparaître, sentant l’urgence de fixer par les mots une existence qui s’achève. Le projet, qu’elle imaginait rapide, lui demandera près d’un an de travail.

Dans ce texte court mais dense, elle retrace la trajectoire d’une femme du XXe siècle. Née dans une famille pauvre de Normandie, sa mère débute comme ouvrière avant de devenir, avec son mari, propriétaire d’un commerce à Yvetot. Déterminée à s’élever socialement, elle mise tout sur l’éducation de sa fille unique. Cette ambition réussie – Annie deviendra professeure et écrivaine – crée paradoxalement une distance entre mère et fille. Les dernières années sont assombries par la maladie d’Alzheimer, qui efface peu à peu la personnalité de cette femme autrefois si vivante.

Le récit entrecroise la grande et la petite histoire, révélant comment une existence individuelle porte en elle toute une époque. À travers sa mère, c’est le portrait d’une France en mutation qui se dessine, celle des années 1920 aux années 1980, marquée par l’émancipation féminine et les bouleversements sociaux.

Publié en 1988 aux éditions Gallimard, « Une femme » forme avec « La place » (1984) un diptyque consacré aux parents de l’autrice. Le livre connaît un succès immédiat, salué par la critique pour sa sobriété et sa justesse. Il sera suivi huit ans plus tard par « Je ne suis pas sortie de ma nuit », journal intime relatant la progression de la maladie de sa mère. En 2019, l’ouvrage est traduit en allemand sous le titre « Eine Frau », confirmant la reconnaissance internationale grandissante d’Annie Ernaux, couronnée en 2022 par le prix Nobel de littérature.

Aux éditions FOLIO ; 120 pages.


6. Les armoires vides (1974)

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« Les armoires vides », premier roman d’Annie Ernaux paru en 1974, raconte l’histoire de Denise Lesur, une étudiante en lettres de vingt ans qui attend, seule dans sa chambre universitaire à Rouen, l’issue d’un avortement clandestin. Dans ce moment de grande vulnérabilité physique et morale, ses souvenirs remontent par vagues, la ramenant à son enfance dans la France provinciale des années 1950.

Fille unique de petits commerçants normands, Denise grandit dans les années 1950 au-dessus du café-épicerie de ses parents à Yvetot. Son univers se partage entre le comptoir où son père sert les habitués, souvent ivres, et la boutique où sa mère vend à crédit aux ménagères du quartier. Ses parents, anciens ouvriers peu instruits mais travailleurs, placent tous leurs espoirs en elle. Ils l’inscrivent dans une école privée catholique où elle côtoie pour la première fois des filles de la bourgeoisie locale. Brillante élève, elle découvre brutalement le fossé qui la sépare de ses camarades issues de milieux aisés et cultivés. Cette prise de conscience déclenche chez elle une violente répulsion pour son milieu d’origine.

Au fil des années, Denise s’éloigne de plus en plus de ses parents. Elle se réfugie dans les études et la lecture, développant une rage de réussir pour prouver sa valeur. À l’adolescence, elle se lance dans des aventures amoureuses clandestines, jusqu’à cette grossesse non désirée qui la ramène brutalement à sa condition sociale.

Ce premier texte d’Annie Ernaux pose déjà les fondations de son œuvre future : la déchirure sociale, la honte des origines, l’émancipation par l’école. Il frappe par sa charge émotionnelle brute et sa structure en bloc compact, sans chapitres ni respirations, miroir formel du flux de conscience de son héroïne qui déverse pêle-mêle souvenirs et sentiments contradictoires.

Le texte résonne avec une force particulière dans le contexte de sa publication : en 1974, au moment même où Simone Veil s’apprête à défendre devant l’Assemblée nationale la loi qui dépénalisera l’avortement. Cinquante ans plus tard, cette œuvre inaugurale continue de saisir par sa manière crue d’aborder les mécanismes de la domination sociale et la violence symbolique subie par les transfuges de classe.

Aux éditions FOLIO ; 181 pages.


7. Mémoire de fille (2016)

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À l’été 1958, Annie Duchesne, 18 ans, quitte pour la première fois le cocon familial et la petite ville d’Yvetot où ses parents tiennent une épicerie. Elle devient monitrice dans une colonie de vacances dans l’Orne. Pour cette jeune fille élevée dans un pensionnat catholique, c’est la promesse d’une liberté nouvelle, loin de la surveillance maternelle et des conventions sociales qui l’ont jusque-là bridée.

Dès son arrivée à la colonie, elle vit sa première expérience sexuelle avec H., le moniteur-chef. Une nuit qui marque le début d’une période trouble : humiliée par les autres moniteurs qui la considèrent comme une « fille facile », elle s’accroche pourtant à cet homme qui l’a déjà oubliée. Les deux années qui suivent la voient osciller entre espoirs et désillusions : elle entre à l’École normale, devient institutrice avant de démissionner, part comme fille au pair en Angleterre. Son corps lui-même traduit ce bouleversement à travers des troubles alimentaires et une aménorrhée qui durera deux ans.

Près de soixante ans plus tard, Annie Ernaux se penche sur cette jeune fille qu’elle était, celle qu’elle appelle « la fille de 58 ». Pour reconstituer ce moment charnière de son existence, elle alterne entre le « je » de l’écrivaine d’aujourd’hui et le « elle » de l’adolescente d’hier. Cette distance lui permet d’examiner sans complaisance ni jugement moral cette période qu’elle a longtemps voulu effacer.

Ce livre attendu depuis vingt ans par l’autrice constitue la pièce manquante de son œuvre autobiographique. Il éclaire notamment ses textes ultérieurs comme « Passion simple » ou « L’occupation ». Adapté au théâtre en 2022 et 2023, notamment au Festival d’Avignon, il résonne particulièrement avec les débats contemporains sur le consentement et la condition féminine.

Aux éditions FOLIO ; 176 pages.


8. La honte (1997)

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En juin 1952, dans une petite ville normande, une scène bouleverse à jamais la vie d’Annie, douze ans : son père tente d’étrangler sa mère dans leur cave. Quelques heures plus tard, comme si rien ne s’était passé, la famille part en promenade à vélo. Cet épisode de violence domestique, tu pendant des décennies, constitue le point de départ du récit autobiographique d’Annie Ernaux.

L’histoire se déroule dans une France d’après-guerre où les codes sociaux régissent chaque aspect de l’existence. Annie fréquente une école privée catholique tandis que ses parents tiennent une épicerie-café. Entre ces deux mondes, la fillette prend conscience des hiérarchies sociales et des différences de classe. La tentative de meurtre de son père agit comme un révélateur : elle comprend que sa famille appartient à cette catégorie de gens dont on parle à voix basse, ceux qui boivent trop ou se battent.

Cette révélation déclenche chez elle un sentiment de honte qui ne la quittera plus. Une honte sociale, celle d’appartenir à un milieu populaire quand ses camarades de classe viennent de familles bourgeoises. Une honte intime aussi, liée à son corps d’adolescente et aux interdits religieux qui l’entourent.

Publié en 1997, ce texte s’inscrit dans une démarche singulière où Annie Ernaux se fait « ethnologue d’elle-même ». Elle reconstitue méticuleusement le contexte de l’époque à travers archives, photos et objets conservés. Sans pathos ni jugement moral, elle dissèque les mécanismes sociaux qui ont façonné son identité. Ce travail de mémoire, salué par la critique, brasse les thèmes qui lui vaudront le Prix Nobel de littérature en 2022 : la condition féminine, les rapports de classe, la violence symbolique.

Aux éditions FOLIO ; 141 pages.


9. Passion simple (1992)

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À l’automne 1989, une quadragénaire vit une liaison intense avec un diplomate russe marié. Elle n’existe plus que dans l’attente de ses appels téléphoniques et de ses visites impromptues. Le temps se dilate entre ces moments fugaces où leurs corps se rejoignent dans son appartement. Elle sait que cette histoire n’a pas d’avenir – lui repartira dans son pays – mais elle s’y abandonne totalement, consciente de vivre quelque chose d’aussi destructeur qu’essentiel.

Toute son existence se réorganise autour de l’attente. Elle achète des vêtements neufs pour lui plaire, évite de passer l’aspirateur de peur de ne pas entendre la sonnerie du téléphone, repousse ses amis. Plus rien n’a de sens en dehors de ces quelques heures volées où ils font l’amour. Elle observe avec lucidité sa propre déraison, cette façon dont la passion la dépossède d’elle-même tout en lui donnant le sentiment paradoxal d’une vie plus intense.

Deux ans plus tard, Annie Ernaux prend la plume pour raconter cette liaison qui l’a consumée. Elle livre un récit sans fard de cette période où elle a tout mis entre parenthèses pour un homme dont elle ne dévoile que l’initiale : A. Le texte alterne entre la chronique clinique d’une obsession amoureuse et des réflexions sur l’écriture elle-même, sur ce qui pousse à transformer une expérience intime en littérature.

Publié en 1992, ce court récit de moins de 80 pages connaît un succès retentissant avec plus de 200 000 exemplaires vendus. Il est traduit dans de nombreux pays et adapté plusieurs fois au théâtre avant d’être porté à l’écran en 2020 par Danielle Arbid, avec Laetitia Dosch dans le rôle principal. En 2001, Annie Ernaux revient sur cette même histoire dans « Se perdre », livre constitué des pages de son journal intime de l’époque.

Aux éditions FOLIO ; 76 pages.


10. L’occupation (2002)

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Dans ce court récit publié en 2002, Annie Ernaux raconte comment elle a vécu la période qui a suivi sa rupture avec W., son amant plus jeune qu’elle. Bien qu’elle soit à l’origine de leur séparation après six ans de relation, l’annonce par W. qu’il s’installe avec une autre femme déclenche chez elle une jalousie obsessionnelle. Cette nouvelle compagne, dont elle ignore tout, va alors envahir son esprit jour et nuit.

La narratrice se lance dans une quête frénétique pour découvrir l’identité de sa « rivale ». Elle épluche l’annuaire, interroge ses connaissances, rôde autour de l’université où travaille cette femme, professeure d’histoire à Paris III. Les quelques indices glanés auprès de W., qui refuse de lui en dire davantage, alimentent ses projections. Cette femme, du même âge qu’elle, devient le centre de toutes ses pensées, jusqu’à l’obsession. Elle analyse chaque détail, imagine leur intimité, se compare sans cesse à elle, toujours à son désavantage.

Cette « occupation » de son esprit la consume pendant plusieurs mois. Elle oscille entre lucidité sur l’absurdité de son comportement et incapacité à s’en défaire. Cette jalousie irrationnelle – puisque c’est elle qui a mis fin à leur relation – la pousse parfois jusqu’à des pensées violentes envers cette inconnue.

Le livre frappe par sa franchise brutale dans l’exposition de sentiments socialement peu avouables. Sans complaisance ni artifice, Annie Ernaux met à nu les mécanismes de la jalousie amoureuse et ses manifestations les plus irrationnelles, qui confinent parfois à la folie. Adapté au cinéma en 2008 par Pierre Trividic et Patrick Mario Bernard sous le titre « L’Autre », avec Dominique Blanc, le texte a également fait l’objet d’une adaptation théâtrale en 2018 au Théâtre de l’Œuvre, dans une mise en scène de Pierre Pradinas avec Romane Bohringer.

Aux éditions FOLIO ; 75 pages.

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