Philippe Delerm, né le 27 novembre 1950 à Auvers-sur-Oise dans le Val-d’Oise, est un écrivain français. Depuis 1975, il réside en Normandie, à Beaumont-le-Roger, en compagnie de son épouse Martine, illustratrice de littérature jeunesse, avec laquelle il a un fils, Vincent Delerm, auteur-compositeur-interprète.
1. La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules
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On dit que la vie n’est pas simple et que le bonheur est rare. Pour Philippe Delerm, il tient en trente-quatre « plaisirs minuscules ». Il évoque ici tour à tour, sous forme de petites séquences, la satisfaction immense qu’il tire tantôt de petits gestes insignifiants, tantôt d’une bienheureuse absence de gestes.
Toutes les saisons sont évoquées dans ce petit ouvrage délicieux qui s’apparente presque à un manuel du bonheur à l’usage des gens trop pressés.
Les plaisirs de la table y ont une place privilégiée et, tout comme les plaisirs d’un autre ordre, font resurgir avec humour et nostalgie l’univers de l’enfance, chez le narrateur comme chez le lecteur, rendus complices par la merveilleuse banalité des situations décrites.
Grâce à ce traité de vie simple, Delerm nous rappelle que prendre le temps, socialement ou à part soi, n’est pas une perte de temps. Certaines séquences sont toutefois ambiguës, comme celle sur Le Dimanche soir.
S’ouvrant sur la description d’une joie, elles s’achèvent avec gravité sur une sensation douloureuse, comme pour nous rappeler que le bonheur, s’il n’est pas rare, est tout de même précieux.
2. La sieste assassinée
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« Mais la minute qui compte, c’est tout à la fin. Les gestes se sont alentis, le coiffeur vous a délivré du tablier de nylon, qu’il a secoué d’un seul coup, dompteur fouetteur infaillible. Avec une brosse douce, il vous a débarrassé des derniers poils superflus. Et l’instant redouté arrive. Le coiffeur s’est rapproché de la tablette, et saisit un miroir qu’il arrête dans trois positions rapides, saccadées : sur votre nuque, trois quarts arrière gauche, droite.
C’est là qu’on mesure soudain l’étendue du désastre… Oui, même si c’est à peu près ce qu’on avait demandé, même si l’on avait très envie d’être coiffé plus court, chaque fois on avait oublié combien la coupe fraîche donne un air godiche. Et cette catastrophe est à entériner avec un tout petit oui oui, un assentiment douloureux qu’il faut hypocritement décliner dans un battement de paupières approbateur, une oscillation du chef, parfois un « c’est parfait » qui vous met au supplice. Il faut payer pour ça. »
3. Je vais passer pour un vieux con et autres petites phrases qui en disent long
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Dans ce nouveau livre, Philippe Delerm nous décrit, avec la finesse et l’élégance d’un peintre de miniatures, de petits tableaux de nos vies quotidiennes. Traquant les apparentes banalités de nos discours – nos petites phrases toutes faites -, il révèle pour chacune un monde de subtilité, de fragilité, de suffisance, de rires en coin… Du vécu, en somme.
Admirateur de Saint-Simon et de Proust, il aime comme eux poser le doigt sur les travers de ses contemporains, les détails qui disent un monde. Lecteur de Jules Renard (particulièrement son Journal) et La Bruyère, il a le goût des portraits et des petites phrases qui dévoilent l’esprit d’une époque.
Ainsi, « Je vais passer pour un vieux con ». Une précaution oratoire souvent entendue, prélude à des propos un peu réactionnaires – mais que l’on s’autorise. Suit généralement l’incontournable » c’était mieux avant »… » Vous n’avez aucun nouveau message ». On ne dit pas assez la cruauté des messageries vocales, qui pourraient se contenter d’un « Vous n’avez pas de nouveau message ». Mais non, elles soulignent, aucun : et c’est ce petit mot qui est impitoyable.
On pense à Nathalie Sarraute qui dans Pour un oui ou pour un non faisait éclater une longue amitié sur la simple façon de prononcer une formule anodine : « C’est bien, ça. » « On n’est pas obligé de tout boire »: attablé au restaurant avec un ami, on hésite entre la demi-bouteille, le pichet ou la bouteille entière. Mais ça ferait sans doute trop. Quand l’un des deux ose revendiquer les 75 cl: »On n’est pas obligé de tout boire… »
4. Les eaux troubles du mojito
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Un recueil de nouvelles sur les plaisir transgressif du mojito, la surprise provoquée par l’averse, la perfection de la pastèque, la nostalgie, l’amour et le bonheur.
Elles sont nombreuses, les belles raisons d’habiter sur terre. On les connaît, on sait qu’elles existent. Mais elles n’apparaissent jamais aussi fortes et claires que lorsque Philippe Delerm nous les donne à lire.
Goûter aux plaisirs ambigus du mojito, se faire surprendre par une averse et aimer ça, contempler un enfant qui apprend à lire en bougeant imperceptiblement les lèvres, prolonger un après-midi sur la plage…
« Est-ce qu’on est plus heureux ? Oui, sûrement, peut-être. On a le temps de se poser la question. Sisyphe arrête de rouler sa pierre. Et puis on a le temps de la dissiper, comme ce petit nuage qui cachait le soleil et va finir par s’effacer, on aura encore une belle soirée. »
5. Et vous avez eu beau temps ?
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Est-on sûr de la bienveillance apparente qui entoure la traditionnelle question de fin d’été : » Et… vous avez eu beau temps ? » Surtout quand notre teint pâlichon trahit sans nul doute quinze jours de pluie à Gérardmer…
Aux malotrus qui nous prennent de court avec leur » On peut peut-être se tutoyer ? « , qu’est-il permis de répondre vraiment ?
À la ville comme au village, Philippe Delerm écoute et regarde la comédie humaine, pour glaner toutes ces petites phrases faussement ordinaires, et révéler ce qu’elles cachent de perfidie ou d’hypocrisie. Mais en y glissant également quelques-unes plus douces, Delerm laisse éclater son talent et sa drôlerie dans ce livre qui compte certainement parmi ses meilleurs.